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Bonne entente

le dimanche, 01 septembre 1940. Dans Autres

(Histoire vécue)

— Allo ! Allo ! Monsieur Lagent, s'il vous plaît.

— Mr. Lagent is not here.

— Voulez-vous lui faire le message alors ?

— I do'nt speak French.

— Y a-t-il quelqu'un qui parle français dans le bureau ?

— Nobody speaks French here.

— Voulez-vous me donner le gérant s'il vous plaît ?

— What do you want ? You do not speak English ?

— Non, je ne parle pas l'anglais et je veux quelqu'un qui parle et comprenne le français. Appelez le gérant.

— What do you want ? The manager ?

— Oui, le gérant.

— Just a minute, please.

★ ★ ★

Le gérant : Yes, madam ?

— Parlez-vous français ?

— I am very sorry, madam, but I do not speak French.

— Avez-vous un employé qui parle français ?

— I am very sorry, but nobody speaks French here.

— Ne savez-vous pas, monsieur, que vous êtes dans Montréal, une ville canadienne-française ? Vous voulez vendre à des Canadiens-français qui parlent les deux langues, c'est vrai, mais dont la langue maternelle est le français.

— I am very sorry.

— Je sais que vous êtes "very sorry", mais ça ne change rien, et ça ne changera rien. Vous ne serez toujours que des imbéciles. Vous voulez servir la clientèle qui parle français et vous ne voulez pas apprendre leur langue.

— I am very sorry, madam.

— Si vous êtes si peiné que ça, cherchez donc dans Montréal une canadienne-française qui parle les deux langues, et donnez-lui à répondre à votre bureau. Elle pourrait satisfaire la clientèle anglaise et la clientèle canadienne-française. La plus humble petite fille de chez nous pourrait en remontrer là-dessus à vos grandes pimbêches d'Anglaises, qui n'ont pour toute supériorité que leur insolence et leurs airs innocents lorsqu'elles disent "I don't speak French".

★ ★ ★

Mais les reproches de la cliente s'éteindront. Et l'insolence des vendeurs continuera.

Et la clientèle achètera encore de cette maison anglaise qui contrôle le marché.

Et les trustards continueront de contrôler.

Et même on dira que c'est les Canadiens-français qui sont les coupables, que c'est eux qui ont appelé cet état de chose par leur soumission, leurs courbettes.

L'histoire se répète. Ce sont les victimes qu'on blâme, puisqu'il faut blâmer quelqu'un. Si on osait blâmer les vrais coupables qui sont forts, on sait bien ce qui arriverait... car les forts n'ont pas fini de dévorer les faibles, dans notre monde "civilisé".

MARIE

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