Ce livre parle du Crédit Social, mais il est loin d’être une somme créditiste. Le Crédit Social, en effet, est toute une orientation de la civilisation et touche au social et au politique autant, sinon plus, qu’à l’économique.
"On oublie, on ne voit pas, on ne veut pas voir qu’il y a des gens mal logés, des gens mal nourris, des salaires insuffisants, qu’il y a des pays tout entiers qui souffrent de la faim. Ce n’est pas chrétien de penser, à plus forte raison de dire; c’est leur faute..."
Son Eminence le Cardinal Jules-Géraud Saliège
L’année sainte de la miséricorde vient de se terminer. Qu’avons-nous retenu de cette année, dont le thème était «Soyez miséricordieux comme votre Père est miséricordieux»? Deux principaux points sont à retenir: d’abord, pardonner à ceux qui nous ont offensés, comme nous le répétons dans la prière du Notre Père. Et aussi, puisque le mot «miséricorde» vient des mots latin «miseria» (misère, malheur) et «cor» (cœur), mettre en pratique la miséricorde signifie donc «avoir le cœur sensible au malheur, à la misère des autres», approcher notre cœur de la misère du prochain. Cela se réalise de façon concrète par la pratique des œuvres de miséricorde, qui se divisent en deux catégories: corporelles et spirituelles.
Ces œuvres de miséricorde consistent en actes tout simples de la vie de tous les jours, mais le Pape François a mentionné que si elles étaient mises en pratique par chaque chrétien, ce serait la face du monde qui serait changée. Les œuvres de miséricorde corporelles sont plus connues, puisqu’elles sont tirées des Béatitudes de l’Évangile: donner à manger aux affamés, donner à boire à ceux qui ont soif, vêtir ceux qui sont nus, accueillir les étrangers, assister les malades, visiter les prisonniers, et on a ajouté: ensevelir les morts.
Les œuvres de miséricorde spirituelles sont moins connues, mais toutes aussi importantes: conseiller ceux qui sont dans le doute, enseigner les ignorants, avertir les pécheurs, consoler les affligés, pardonner les offenses, prier Dieu pour les vivants et pour les morts, supporter patiemment les personnes ennuyeuses.
Cette dernière œuvre de miséricorde signifie qu’il faut être patient envers notre prochain, comme Dieu est patient envers nous. Dans la vie de tous les jours, cela s’applique surtout au dialogue: lorsque nous discutons avec quelqu’un, on a souvent tendance à l’interrompre, et même à ne pas lui laisser finir ce qu’il voulait dire, quand on voit qu’il ne partage pas notre point de vue. C’est souvent la cause de bien des mal-entendus, qui peuvent tourner en rancœurs, conflits et même guerres ouvertes, tant au niveau individuel, familial, professionnel, ou même international .
Le dialogue était justement le thème de la catéchèse donnée par le pape François place Saint-Pierre, le samedi 22 octobre 2016. Voici les paroles du Saint-Père, à méditer longuement… et à mettre en pratique!
Chers frères et sœurs, bonjour!
Notre vision des choses dépend de notre point de vue: avant de dire que l’autre a tort, il faut écouter ses arguments, c’est-à-dire se mettre à sa place pour pouvoir comprendre son point de vue... |
Le passage de l’Évangile de Jean que nous avons écouté (cf. 4, 6-15) rapporte la rencontre de Jésus avec une femme samaritaine. Ce qui frappe dans cette rencontre est le dialogue très intense entre la femme et Jésus. Cela nous permet de souligner aujourd’hui un aspect très important de la miséricorde, qui est propre au dialogue.
Le dialogue permet aux personnes de se connaître et de comprendre les exigences les uns des autres. Celui-ci est tout d’abord un grand signe de respect, car il place les personnes dans une attitude d’écoute et dans la condition de recevoir les meilleurs aspects de l’interlocuteur. En deuxième lieu, le dialogue est une expression de charité, car, sans ignorer les différences, il peut aider à rechercher et à partager le bien commun. En outre, le dialogue nous invite à nous placer devant l’autre en voyant ce dernier comme un don de Dieu, qui nous interpelle et qui nous demande d’être reconnu.
Très souvent, nous ne rencontrons pas nos frères, bien que vivant à leurs côtés, en particulier quand nous faisons prévaloir notre position sur celle de l’autre. Nous ne dialoguons pas quand nous n’écoutons pas assez ou bien quand nous tendons à interrompre l’autre pour démontrer que nous avons raison.
Pourtant, combien de fois, combien de fois quand nous sommes en train d’écouter une personne, nous l’arrêtons et nous disons: «Non! Non! Ce n’est pas comme ça! » et nous ne laissons pas la personne finir d’expliquer ce qu’elle veut dire. Et cela empêche le dialogue: cela est une agression. Le véritable dialogue, en revanche, a besoin de moments de silence, pendant lesquels saisir le don extraordinaire de la présence de Dieu chez notre frère.
Chers frères et sœurs, dialoguer aide les personnes à humaniser les relations et à surmonter les incompréhensions. Il y a tellement besoin de dialogue dans nos familles, et comme l’on résoudrait plus facilement les problèmes si l’on apprenait à s’écouter réciproquement! Il en est ainsi dans la relation entre mari et femme, et entre parents et enfants. Une grande aide peut également provenir du dialogue entre les enseignants et leurs élèves; ou bien entre les dirigeants et les ouvriers, pour découvrir les meilleures exigences du travail.
L’Église vit aussi du dialogue entre les hommes et les femmes de chaque époque, pour comprendre les nécessités qui sont au cœur de chaque personne et pour contribuer à la réalisation du bien commun. Pensons au grand don de la création et à la responsabilité que nous avons tous de sauvegarder notre maison commune : le dialogue sur un thème aussi central est une exigence inéluctable. Pensons au dialogue entre les religions, pour découvrir la vérité profonde de leur mission au milieu des hommes, et pour contribuer à la construction de la paix et d’un réseau de respect et de fraternité (cf. Enc. Laudato si, n. 201).
Pour conclure, toutes les formes de dialogue sont l’expression de la grande exigence d’amour de Dieu, qui va à la rencontre de tous et place en chacun une semence de sa bonté, pour que la personne puisse collaborer à son œuvre créatrice. Le dialogue abat les murs des divisions et des incompréhensions; il crée des ponts de communication et ne permet à personne de s’isoler, en se renfermant dans son petit monde.
N’oubliez pas: dialoguer signifie écouter ce que me dit l’autre et dire avec douceur ce que je pense. Si les choses se déroulent ainsi, la famille, le quartier, le lieu de travail seront meilleurs. Mais si je ne laisse pas l’autre dire tout ce qu’il a sur le cœur et que je commence à hurler — aujourd’hui on hurle beaucoup — cette relation entre nous ne se terminera pas bien; la relation entre mari et femme, entre parents et enfants ne se terminera pas bien. Écouter, expliquer, avec douceur, ne pas crier contre l’autre, ne pas hurler, mais avoir un cœur ouvert.
Jésus connaissait bien ce qu’il y avait dans le cœur de la samaritaine, une grande pécheresse; malgré cela, il n’a pas refusé qu’elle s’exprime, il l’a laissée parler jusqu’au bout, et il est entré peu à peu dans le mystère de sa vie. Cet enseignement vaut également pour nous. A travers le dialogue, nous pouvons faire grandir les signes de la miséricorde de Dieu et en faire un instrument d’accueil et de respect.
Pape François