Ce livre parle du Crédit Social, mais il est loin d’être une somme créditiste. Le Crédit Social, en effet, est toute une orientation de la civilisation et touche au social et au politique autant, sinon plus, qu’à l’économique.
"On oublie, on ne voit pas, on ne veut pas voir qu’il y a des gens mal logés, des gens mal nourris, des salaires insuffisants, qu’il y a des pays tout entiers qui souffrent de la faim. Ce n’est pas chrétien de penser, à plus forte raison de dire; c’est leur faute..."
Son Eminence le Cardinal Jules-Géraud Saliège
Par Mgr Louis Baunard, recteur des facultés Catholiques de Lille, France, en 1880
Dans Vers Demain de mars-avril 2005, nous avons publié la première partie du chapitre sur la pureté, tiré de l'ouvrage si beau, si élevant de Mgr Louis Baunard, grand éducateur du 19e siècle qui a passé à côté de la révolution en France, en fondant des collèges pour sauver les enfants des écoles sans-Dieu et sans moeurs de l'État révolutionnaire, comme sont nos écoles d'aujourd'hui, dont l'essentiel du programme est de corrompre les innocents. Sans cela, leur révolution ne peut s'accomplir tout à fait. Voici maintenant la deuxième partie du chapitre sur la pureté de Mgr Baunard. Pénétrons-nous de ces enseignements plutôt que d'élucubrations d'aliénés sur le sexe.
"Le sexe, a écrit Mme Gilberte Côté-Mercier, est pratiqué comme une religion par nos sexologues diplômés. Pour nous, baptisés dans la vraie Église du Christ, c'est grande apostasie et déchéance que d'étudier ces magies de Satan appelées « sexologie ». Ce nom seul est un blasphème : « logos » veut dire parole, verbe. Sexologie : discours sur le sexe, comme pour souiller la parole, le verbe. On sait que le Fils de Dieu, le Christ, est le Verbe de Dieu. Le mot « sexologie », dans l'esprit de Satan son inventeur, est un crachat au visage du Verbe fait homme. Et dans la bouche de nos contemporains, c'est un mot indigne qu'ils répètent sottement comme des perroquets du Prince des ténèbres."
Ne vous disais-je pas aussi que la chasteté est la vie de la volonté, la condition première de sa liberté et de sa force ? Ils étaient forts, mes chers fils, parce qu'ils étaient libres, et ils étaient libres parce qu'ils étaient chastes, tous ces hommes qui ont vaincu le monde en triomphant d'eux-mêmes, ces apôtres, ces cénobites, ces anachorètes, ces confesseurs de la foi qui savaient tout braver pour le service de Dieu, de l'Église et des âmes. Et savez-vous à quoi tient l'impuissance radicale de tant d'hommes de nos jours ? C'est qu'ils ne sont plus chastes ; ils ont la corde au cou, un lien honteux les empêche de se soulever de terre ; et l'asservissement chez eux va de pair avec l'amollissement ; je devrais dire pour plusieurs avec l'abrutissement.
Ah ! vous qui êtes tentés de vous vendre à ce maître odieux qui vous enverra, comme l'enfant prodigue, sur sa ferme nourrir les cochons, vous allez prendre des fers, sachez-le bien ; chaque faute que vous commettrez sera un enlacement nouveau de cette chaîne de honte. Bientôt elle sera indissoluble, inextricable ; c'en sera fait, vous ne résisterez plus, vous en aurez perdu le pouvoir et le vouloir. À tout ce qu'on vous dira pour votre délivrance vous répondrez : "Je ne puis, cela est plus fort que moi !" Et vous ne direz que trop vrai. Alors adieu, courage ; adieu, vertu ; adieu, mâles énergies du devoir et de la souffrance ! Il ne reste plus rien de l'homme. "Quand Jupiter fait un homme esclave, a dit Homère, il lui ôte la moitié de son âme." Triste esclave du péché, que vous reste-t-il de la vôtre ?
Seconde question : qu'allez-vous faire pour garder la chasteté ? La question est urgente, car l'ennemi déborde de toutes parts. À chaque coin de rue, à chaque heure de jour ou de nuit, un coup mortel peut partir, vous atteindre et vous abattre. Sentinelles, faites bonne garde, ou vous êtes perdus !
Vous veillerez donc, mes chers fils : c'est le premier devoir. Vous veillerez d'abord sur vos yeux, car c'est par les fenêtres qu'entre la mort", comme s'exprime l'Écriture. L'Écriture dit encore qu'il faut faire un pacte avec ses yeux, ne cogitarent de virgine. Le vice court les rues aujourd'hui impunément. Il s'étale aux vitrines, aux kiosques, dans les magasins, dans les cafés, dans les théâtres, dans les musées, dans les expositions, (à la télévision). La peinture, la gravure, la sculpture, la musique, tous les arts sont aujourd'hui au service du péché.
On nous faisait lire autrefois une description intitulée « La Caverne aux serpents » où l'on voyait un homme entouré de reptiles qui sortaient de toutes parts. Cette caverne, vous y êtes, mes enfants, dès que vous quittez le collège ou le foyer. Et quel venin que celui des serpents dont je parle ! (NDLR : En 2005, Mgr Baunard dirait sans doute ceci : Cette caverne, vous y êtes, mes enfants, surtout à l'école, et même au foyer si vous regardez la télévision).
Vous veillerez sur vos oreilles. Aujourd'hui les entretiens, les réunions mondaines, les soirées et les fêtes exhalent une odeur de mort. C'est l'empoisonnement universel. Quel ravage peut produire en vous un mot, une conversation, une confidence, une romance, un couplet, qui de votre oreille descend et se répand dans votre coeur, comme une liqueur de feu ! Souvenez-vous de ce que je vous ai dit sur les mauvaises relations, les mauvaises lectures et les mauvais amis.
Vous veillerez sur vos paroles. L'apôtre nous avertit qu'il est certain péché qui ne doit même pas être nommé parmi nous, sicut decet sanctos (comme il convient aux saints). Je n'ai pas besoin, je l'espère, de prémunir votre langue contre les paroles obscènes ; mais je voudrais bien aussi qu'elle s'interdit soigneusement toute parole grossière. Ce n'est pas assez de garder la pureté dans le langage, j'y veux aussi la décence, la dignité, la pudeur. Il est certains mots malséants et malpropres qui ne doivent jamais passer dans le langage de gens biens élevés et à plus forte raison de jeunes gens chrétiens. Il est certaines grosses histoires, ou plutôt grasses histoires, qui prétendent provoquer le rire, et qui ne devront rencontrer chez vous que le dégoût. Ces expressions ou narrations, on les appelle malhonnêtes, c'est cela ; c'est en effet de la malhonnêteté au premier chef que de parler de ces choses.
Les natures délicates répugnent à ces souillures, et les sociétés civilisées les proscrivent de leur langage. Laissez-les donc en monopole aux corps de garde ou aux halles ; vous vous devez plus de respect à vous-mêmes, et aux autres ; et je ne veux rien que de digne, de pudique et de modeste, sur des lèvres qui s'ouvrent pour le Pater Noster, pour l'Ave Maria et pour la sainte communion !
Vous aurez aussi à veiller sur vos démarches, mes chers fils, Il y a certains lieux de divertissements profanes où vous ne mettrez jamais les pieds.
J'ai nommé plus haut le théâtre. Je vous en parlerai peut-être plus tard ; pour le moment je ne vous en dirai que deux mots. Le premier est que notre règlement vous l'interdit formellement, soit dans cette ville, soit ailleurs, soit seul, soit en la compagnie de vos parents, lesquels auraient ensuite à en répondre devant nous et à faire leur option entre le théâtre et nous. La seconde chose que je vous dirai, c'est que le théâtre n'est pas de votre âge, et que s'il n'est bon pour personne, il est pernicieux pour vous. Jeune oiseau, ne vous approchez pas de cette rampe flamboyante : on s'y brûle les ailes.
Vous veillerez sur vos manières. En général, mes chers fils, on est trop familier dans le siècle présent. C'est le siècle des poignées de mains et des habitudes lâchées. Or je ne connais rien de plus vulgaire et quelque fois de plus dangereux que ces poignées de main, distribuées au premier venu ou à la première venue. En tout je voudrais qu'on s'en tînt à ces sages recommandations d'un observateur chrétien :
"Lorsque vous avez la faiblesse de laisser ainsi fouler aux pieds devant vous et avec vous les petites convenances, les petites délicatesses, le langage et les manières nobles, vous ne savez pas à quel point vous exposez les grandes vertus. L'ennemi n'osera porter sur vous une main hardie que si vous n'avez pas su d'abord le tenir à distance par les milles bienséances qui forment autour de vous autant de remparts invisibles et bien gardés. Ne laissez rien prendre ; que le langage, les manières, le ton, les mots, les regards, les attitudes, la mise, soient des redoutes, abris de l'honnêteté, gardiennes de la pudeur. "Mais qu'est-ce que cela fait ? Mais pourquoi pas ?" Avec ces deux mots on va loin.
Enfin veillez sur vos pensées. Dieu doit être roi de votre esprit autant qu'il l'est de votre corps, et vous n'avez pas plus le droit de souiller l'un que l'autre : Non concupisces. Vous ne pouvez, dites-vous, vous empêcher de sentir ; mais vous pouvez toujours vous défendre de consentir. Soyez fort par la grâce de Dieu, mais j'ajouterai aussitôt : Soyez calme. En présence de la tentation ou représentation, ne vous troublez pas, mon enfant, ne vous agitez pas ; ce serait exciter la meute qui vous assiège à aboyer contre vous. Mais tournez-leur le dos, et passez votre chemin. Mes chers fils, c'est une belle chose que la Chasteté du corps ; mais la chasteté de l'esprit, mais la chasteté du cœur ! Cor mundum crea in me, Deus ! (Dieu, vous avez créé en moi un cœur pur).
La vigilance ne suffit pas. Elle sert à éloigner le mal ; mais qui nous donnera le vrai bien ? Montons plus haut : qu'allez-vous faire ? La recette est bien simple. Puisqu'il nous faut aimer, au lieu de l'amour mauvais, mettez en vous le saint amour. Au lieu d'aimer en bas, aimez en haut ; et nul amour ne sera plus haut ni plus préservateur pour vous que l'amour du coeur de Jésus, de sa croix, de sa Mère.
Vous aimerez Jésus-Christ ; attachez-vous à son Coeur sacré pour y coller le vôtre, et voici ce qui arrivera ; c'est que bientôt cet amour, vous ravissant tout entier, fera pâlir tous les autres, et que nulle beauté terrestre ne pouvant approcher de cette beauté divine, tout le reste vous paraîtra insipide auprès de lui. L'amour de Jésus-Christ est un feu consumant, il brûlera, il dévorera tout le reste, comme l'étincelle qui court dans les roseaux. Et comment vous serait-il possible de placer une idole de chair sur cet autel où règne Jésus dans son éclat divin ? Ignis consumens est (le feu consume). Faites plus, attachez-vous à la chair eucharistique de Jésus, à son hostie, à son calice ; c'est un pain de pureté. J'ai dit encore : Attachez-vous à la croix de Jésus. Vous souvenez-vous d'avoir lu dans l'Odyssée, que le roi Ulysse se fit attacher au mât de son navire pour qu'il ne lui fût pas possible de se laisser entraîner par le chant des Sirènes ? Attachez-vous au bois de la croix pour éviter l'entraînement des voluptés.
La croix de Jésus, c'est la pénitence, et la vie pénitente est le plus sûr rempart de la vie continente. Elle produit ce double effet d'expier le péché et de prémunir contre le péché. La bête se révolte en vous : réprimez la bête, domptez la bête ; sinon, dans quel précipice, elle vous entraînera ! Pour cela, que devrez-vous faire ? Vous lever tôt, travailler fort, vous contenir à la table : in vino luxuria (dans le vin on trouve la luxure), dit l'Écriture ; non in comessationibus, in ebrietatibus, (ni dans les festins ni dans l'ivresse), dit saint Paul. Et s'il fallait faire davantage et frapper de plus grands coups sur cet ennemi irréconciliable, s'il fallait jeûner, vous flageller, vous mortifier, coûte que coûte, ne sauriez-vous faire ce qu'ont fait tant de jeunes saints de votre âge ?
Enfin attachez-vous à la Mère de Jésus. Marie est la Mère de toute grâce, mais plus spécialement de cette grâce des grâces. Invoquez-la ; imitez-la ; elle est l'Immaculée. Saint Jean, l'apôtre vierge, fit de Marie sa Mère adoptive, sa société fidèle : Accepit eam in sua. Faites comme lui, prenez Marie avec vous, in sua : vos désirs, in sua ; vos jours, vos nuits, in sua. Qu'elle soit chez vous partout. Si vous la gardez, elle vous gardera. Le péché ne viendra pas vous prendre sous sa toute-puissante sauvegarde ; on ne tue pas un fils dans les bras de sa mère.
Il est un de ces enfants de Marie Immaculée dont le nom royal et saint exhale le parfum des lis. C'est Casimir de Pologne, duc de Lituanie : je vous le présente en finissant. Petit-fils, fils, frère et oncle d'empereurs et de rois, Casimir promet au trône des Jagellons tout ce qui fait la gloire des princes et le bonheur des peuples. Il est sage, il est brave, il est juste, il est pieux, il est généreux, il est grand. La Hongrie lui a offert le sceptre à l'âge de treize ans, la Pologne salue en lui l'espérance d'un beau règne. Mais la couronne royale ne lui fera pas sacrifier celle de sa virginité : il meurt à vingt-cinq ans, en 1483, victime volontaire de la pureté, entre les bras de la Reine des anges, en lui redisant l'hymne qu'il a l'habitude de réciter chaque jour, et qu'il demande à emporter dans son cercueil. Il est devenu là-haut l'ange de sa patrie. Lorsque, cent vingt ans plus tard, on ouvrit son tombeau, le jeune saint, encore conservé tout entier, tenait dans sa main ce cantique qui porte son nom et vous est familier : Omni die, Dic Mariae, Mea laudes anima. Mes ches fils, je vous demande de l'entonner maintenant et de le chanter jusqu'à cette strophe, qui sera l'achèvement de mon discours : Ut sim castus et modestus, etc. Amen ! » (Puissé-je être chaste et modeste !).
Mgr Baunard