Le « bogue de l'an 2000 » pourrait créer la pire crise économique de l'histoire
Les ordinateurs cesseront de fonctionner
Pour certains, l'an 2000 s'annonce comme étant le début d'un « nouvel âge », ou « ère du Verseau », une période de prospérité sans précédent dans l'histoire de l'humanité. Pour d'autres, par contre, cette même année annonce des catastrophes apocalyptiques encore jamais vues, laissant même présager la fin des temps et le retour du Christ. (Toutefois, la multiplication récente de catastrophes naturelles - tornades, tremblements de terre, épidémies - un des signes mentionnés par Jésus au chapitre 24 de l'Évangile selon saint Matthieu, comme devant précéder sa seconde venue, donne à réfléchir.)
Mais d'un simple point de vue scientifique, même ceux qui ne croient pas du tout à la Bible sont forcés d'admettre que l'arrivée de l'an 2000 amène le risque d'une crise sans précédent à l'échelle mondiale, créée par ce qu'on appelle le « bogue de l'an 2000 » : le 1er janvier de l'an 2000, des millions d'ordinateurs sur la planète cesseront de fonctionner, ne pouvant tout simplement pas reconnaître la nouvelle année. Et cela pourrait même arriver dès le début de 1999, ou même avant.
La seule inconnue demeure l'ampleur de cette catastrophe, selon le nombre d'ordinateurs qu'on aura réussi à réparer avant l'an 2000. Mais un point sur lequel tous les experts s'accordent, c'est qu'une majorité d'ordinateurs ne seront pas prêts à temps, même parmi ceux des banques et des gouvernements, ce qui entraînera les situations les plus désastreuses pour l'ensemble de la population. Au fil des années, la société a pratiquement fait un dieu de la technologie. Quels paradoxe et ironie ce serait de voir ce dieu s'écrouler de façon aussi spectaculaire au seuil de l'an 2000, mais quel cauchemar les gens auraient à vivre par la suite !
En quoi consiste ce fameux « bogue de l'an 2000 qui entraînera l'arrêt des ordinateurs ? Voici : Lors de la création des premiers ordinateurs dans les années 50 et 60, les coûts de fonctionnement étaient énormes (les ordinateurs d'alors occupaient des étages entiers, alors qu'aujourd'hui, grâce à la miniaturisation, ils peuvent tenir sur un bureau). Afin d'économiser de l'espace sur la mémoire des ordinateurs, on s'efforçait de tenir les instructions aussi courtes que possible. C'est ainsi que pour les dates, on a décidé d'inscrire les années avec seulement deux chiffres au lieu de quatre (98 par exemple au lieu de 1998), ce qui représentait une économie appréciable d'espace et de temps de calcul.
Le hic, c'est que lorsqu'on passera au 1er janvier de l'an 2000, l'immense majori-é des ordinateurs (ceux qui n'auront pas été corrigés d'ici là) traduiront incorrectement l'année « 00 par l'année 1900, au lieu de 2000 (car ils ont toujours fonctionné en supposant que les deux premiers chiffres non inscrits étaient « 19 »), ce qui entraînera soit de faux calculs, ou bien un arrêt complet et définitif de l'ordinateur, avec la perte complète de toutes les données. On peut à peine s'imaginer tous les problèmes que cela créera, car à peu près toutes les activités économiques aujourd'hui sont régies par les ordinateurs.
Alors pourquoi avoir utilisé deux chiffres au lieu de quatre pour inscrire les années, en sachant que les ordinateurs ne pourraient reconnaître l'an 2000 ? C'est que même dans les années 70, personne n'imaginait qu'on aurait des problèmes avec l'an 2000, parce que personne ne croyait que les systèmes d'alors allaient se rendre aussi loin, et seraient encore en usage à la veille du 21e siècle. Les programmeurs en informatique leur imaginaient une espérance de vie de dix à quinze ans maximum, et étaient convaincus que de nouveaux systèmes les remplaceraient bien avant l'an 2000, et régleraient le problème. Sauf qu'au lieu de remplacer ces premiers programmes, on les a maintenus, renforcés, et même « rajouté des couches ».
On pensait ainsi sauver des sous, mais maintenant on s'aperçoit que cette négligence coûtera très cher. Car même si c'est un problème qui semble enfantin (rajouter les deux chiffres qui manquent, « 20 »), la tâche requerra un effort colossal, aux coûts astronomiques. Le groupe Gartner, une firme spécialisée dans la recherche des technologies de l'information, évalue ce coût à 600 milliards $ pour l'ensemble de la planète, dont 75 milliards $ pour les États-Unis, et plus de 7 milliards $ pour le Canada. Et on ne parle pas des poursuites possibles contre les entreprises qui auront perdu des données au tournant de l'an 2000 et causé des torts irréparables à leur clients : on parle alors de poursuites pouvant totaliser plusieurs milliers de milliards de dollars... et la faillite de ces entreprises, évidemment.
Pourquoi des coûts si élevés ? C'est que pour régler le problème, il ne suffit pas d'insérer une disquette dans l'ordinateur, puis d'appuyer sur une touche du clavier et attendre que le problème se règle comme par magie. Non, la solution est beaucoup plus compliquée. Chaque programme utilisé par l'ordinateur est formé de plusieurs milliers de lignes de code, formant le « code source » qui donne les instructions à l'ordinateur. (Une entreprise moyenne compte 12 millions de ces lignes de code, mais une grosse compagnie, comme AT&T, compte 500 millions de lignes de code.)
Il faut alors trouver, corriger et mettre à l'essai CHAQUE ligne de code, pour chaque système. Or, une institution financière typique peut compter de quatre à six cents systèmes, tous interreliés. Une seule erreur dans une seule ligne oubliée et plus rien ne fonctionnera. Il faut donc TOUT vérifier, TOUT tester ; faire les changements un par un, et en vérifier immédiatement les effets.
Ce qui complique encore davantage le problème, c'est que la plupart de ces programmes écrits il y a 20, 30 ou 40 ans, l'ont été dans des langages de programmation qui ne sont plus utilisés aujourd'hui, donc que les programmeurs actuels ne connaissent pratiquement pas. Le langage le plus utilisé d'alors, COBOL, est inutilisé depuis 20 ans... et il existe plus de 400 différents langages de programmation ! De plus, pour pouvoir tester la correction effectuée, on a besoin d'un espace équivalent libre sur l'ordinateur, ce que ne permettent pas les gros ordinateurs des gouvernements, déjà utilisés à pleine capacité.
On réalise tout de suite que la main-d'œuvre requise pour réparer tous les ordinateurs ne sera pas disponible, et même si elle était disponible, on n'aura tout simplement pas le temps d'effectuer toutes les réparations d'ici l'an 2000. Les entreprises et gouvernements ont réagi trop tard, n'ayant pas pris ce problème au sérieux. Des milliers d'entreprises vont ainsi disparaître à cause de cela.
En octobre 1997, le Vérificateur Général du Canada, Denis Desautels, sonnait l'alarme, en disant que seulement 30% des ministères du gouvernement canadien avaient élaboré une stratégie pour faire face au « bogue de l'an 2000 », et qu'il craignait que le gouvernement ne puisse plus offrir en l'an 2000 les principaux programmes et services essentiels à la population, comme par exemple la livraison des différents chèques du gouvernement. M. Desautels ajoutait que pour les ministères et entreprises qui n'avaient encore rien entrepris en 1997 concernant ce problème, il était déjà trop tard, et qu'il leur est impossible d'être prêts pour l'an 2000.
Aux États-Unis, en date du 15 février 1998, seulement 35 pour cent des 8,500 systèmes d'ordinateurs s'occupant des « priorités critiques » du pays étaient prêts pour l'an 2000, et selon Stephen Horn, membre du Congrès et président du comité sur le « bogue du millénaire », seulement 63% des systèmes seront prêts pour l'an 2000. (L'Europe et l'Asie sont davantage en retard.) Le Département de la Sécurité Sociale (l'un des mieux préparés à faire face au bogue de l'an 2000, selon M. Horn), a commencé les réparations sur ses ordinateurs il y a six ans, et les programmeurs ont réussi jusqu'ici à réparer 6 millions de lignes de code. Le problème, c'est qu'il en reste encore 200 millions à réparer... Au rythme actuel, le Département de la Défense ne sera prêt qu'en 2012, le Département du Trésor (responsable de l'impôt) en 2004, etc.
Selon ce comité présidé par M. Horn, un des secteurs les plus en retard aux États-Unis est celui des banques, où l'interconnection des ordinateurs des différentes banques est d'une extrême importance. Alan Greenspan, le président de la Réserve fédérale (banque centrale des États-Unis), va même jusqu'à dire qu'un taux de 99% de préparation des banques pour l'an 2000 ne sera pas suffisant, car de fausses informations fournies par les banques n'ayant pas fait les corrections pour l'an 2000, suffiront à paralyser l'ensemble du système bancaire.
Tout cela n'annonce rien de bon, mais ce n'est que la pointe de l'iceberg. Il existe aussi dans le monde plus de 25 millions de micropuces enchâssées dans les appareils électroniques (ascenseurs, fours micro-ondes, réacteurs nucléaires, contrôle aérien, etc.) qui sont sensibles au changements de date. Elles aussi connaîtront une défaillance en l'an 2000 si elles ne sont pas remplacées. La plupart de ces micropuces sont extrêmement difficiles à localiser, et la documentation sur ce sujet est à peu près inexistante.
Comme il a été mentionné précédemment, à peu près tous les secteurs de l'activité humaine fonctionnent maintenant à l'aide d'ordinateurs. Seront touchés par le bogue de l'an 2000 : les systèmes de distribution d'énergie (eau, électricité, gaz, essence, chauffage), les télécommunications (radio, télévision et journaux), les trains et avions, les systèmes de distribution des marchandises (y compris des aliments), les manufactures, les banques et compagnies d'assurance, les services gouvernementaux, la défense nationale, les hôpitaux. Alors le bouleversement dans la vie des citoyens (c'est certain qu'il aura lieu) sera tout à fait incroyable et sans précédent : Au 1er janvier de l'an 2000, il est très possible (et probable) que tous les secteurs mentionnés ci-haut soient affectés et même complètement paralysés.
En fait, plusieurs ordinateurs commencent déjà à faire défaut puisqu'ils ont déjà à faire des calculs avec l'an 2000. Plusieurs ordinateurs cesseront de fonctionner vers le milieu de 1998 en raison du début de l'année fiscale 1998-99 dans plusieurs pays. D'autres ordinateurs pourraient aussi connaître de sérieux problèmes dès l'apparition du chiffre « 99 », qui est un raccourci pour mettre un terme final au programme, ce qui signifie que les ordinateurs fermeraient alors de façon permanente. Dès que cela arrivera dans un État ou une province, la panique se répandra rapidement dans le reste du pays. Les gens courront retirer leur argent des banques, mais ils ne pourront se faire rembourser qu'une infime partie de leurs comptes, les banques ne gardant en réserve de papier monnaie que 2 à 3 pour cent du total des dépôts.
Cette crise prévue pour l'an 2000 prendra probablement des proportions catastrophiques, mais il existe une solution pour les gouvernements afin d'éviter le chaos et continuer d'assurer les services à la population. C'est ce que nous verrons dans l'article ci-contre.