Il s'agit des États-Unis. On devra convenir que, proportion gardée des populations respectives, c'est assez la même chose au Canada.
Les faits se rapportent à l'élection de 1940, celle qui a placé M. Roosevelt à la présidence pour un troisième terme. Ils sont rapportés dans The Social Crediter du 26 avril, avec indication des sources de renseignement.
Il n'y a pas très longtemps, le Congrès Américain adoptait une loi, dite Loi Hatch, du nom de celui qui la préconisa, pour freiner un peu les souscriptions colossales faites aux caisses des partis par des groupes de financiers opulents qui devenaient ainsi les véritables dirigeants, traçant eux-mêmes les programmes des partis et choisissant les candidats qui seraient placés devant l'électorat.
La loi Hatch limitait à trois millions de dollars les frais de campagne électorale permis à chaque parti.
Le correspondant new-yorkais du Catholic Herald, parlant de l'élection de 1940, dit qu'elle fut accompagnée d'une telle orgie de corruption ouverte et à cœur joie, que le Sénat des États-Unis dut nommer un comité d'enquête pour examiner le cas.
Le 7 mars dernier, le comité termina son investigation en annonçant que la loi Hatch avait été un échec complet. Au moins 22 millions de dollars avaient été dépensés ouvertement, et probablement bien davantage indirectement.
On sait qu'il s'agissait d'une élection historique, tenue dans des circonstances particulièrement graves, en face d'un monde livré à la tuerie et tourné vers les États-Unis pour sa délivrance. À une époque aussi où les hommes publics roulent de belles périodes sur la civilisation en péril, et où les chefs religieux rappellent que seules, la prière, la méditation et la pénitence fléchiront le ciel qui permet ce fléau pour punir un monde paganisé. Or, voici ce que déclare le sénateur Guy M. Gillette, de l'Iowa, président du comité d'enquête sur les dépenses d'élection :
"Bien qu'il y ait probablement eu des irrégularités, des fraudes, des transgressions et des abus dans les élections du passé, je crois ne rien exagérer en disant que jamais, dans toute l'histoire de l'Amérique, on n'assista à pareille tentative pour débaucher l'électorat américain par la dépense d'énormes sommes d'argent."
Un modeste journal américain, In Fact, qui essaie de donner des nouvelles impartiales, affirme qu'un petit groupe de millionnaires, banquiers et hommes d'affaires, à la tête duquel se trouvent les DuPonts, les Pews, les Sinclairs, les Rockefellers et les Morgans, fournit la plus grande partie des fonds électoraux tant aux Républicains qu'aux Démocrates, achetant ainsi véritablement la présidence de la nation. En une campagne, les DuPonts ont dépensé $800,000, et les Pews $100,000.
On sait que les DuPonts sont les souverains des munitions de guerre, comme les Rockefellers le sont du pétrole, et que le crédit des Morgans finance en hauts lieux, aussi bien chez les totalitaires qu'en pays à régime parlementaire.
Roosevelt était candidat des Démocrates. Or, d'après In Fact, des hommes riches, que Roosevelt a publiquement dénoncés comme des dictateurs économiques, jugèrent conforme à leurs intérêts de souscrire fortement aux fonds électoraux du parti démocrate durant les trois campagnes de Roosevelt. L'un de ces souscripteurs est associé de J. P. Morgan & ; Co. D'autres sont des officiers de la National City Bank, de la General Electric, de la Radio Corporation, de la National Broadcasting et de General Motors. Les trustards de la banque, de l'électricité, de l'information et du transport !
Pendant qu'un des associés de J. P. Morgan contribuait aux fonds de M. Roosevelt, J. P. Morgan lui-même fournissait de l'argent aux fonds de l'autre candidat, M. Wilkie. Les DuPonts souscrivirent aussi aux caisses des deux partis, pour être sûrs de leur affaire, quel que fût le résultat du scrutin.
Le correspondant du Catholic Herald remarque que le rapport Gillette, qui étale des faits aussi révoltants, n'a point reçu une grande publicité. Les journaux ne l'ont pas placé en vedette, comme ils l'eussent fait d'un vulgaire cambriolage. Il fallait le découvrir dans des petits coins retirés sur les pages intérieures, si bien qu'il a échappé au public. Ce que voulaient les coupables. C'est ainsi que le gros New York Times le plaça sur sa page 42. Qui donc lit 42 pages d'un journal quotidien ?
Lorsque, le 17 janvier, le comité d'enquête annonçait que les Rockefellers, les DuPonts et les Pews avaient fourni $276,725 dollars aux fonds électoraux de M. Wilkie, le fait était d'importance. Or un seul journal, le New York World Telegram, le plaça en première page, et pour une seule édition, le transférant aux pages intérieures pour les éditions suivantes.
Comme le souligne le correspondant new-yorkais du Catholic Herald, à l'heure où les régimes démocratiques subissent une épreuve mondiale, il est pour le moins malheureux que la grande démocratie américaine offre à l'univers un exemple colossal de vénalité et d'absence de sérieux dans le choix de son plus haut gouvernement.