M. l’Abbé André Nicaise Tehoua, du Cameroun, a assisté à notre semaine d’étude en août 2014 à Rougemont. Voici ses impressions:
J’ai beaucoup reçu et j’ai l’impression qu’un feu m’habite et me pousse de l’intérieur à approfondir la réflexion et à prendre part à l’action pour une amélioration substantielle des choses. Le combat pour le Crédit Social est le combat de l’Église pour l’avènement d’une société juste et paisible. C’est véritablement le Christianisme appliqué, selon les termes de Mgr Mathieu Madega. Pour revenir aux enseignements, je voudrais résumer ce que j’ai appris, en utilisant non pas d’abord des concepts, mais des images comme on le fait dans l’Afrique traditionnelle. J’utiliserais à cet effet l’image de l’arbre. La Bible le fait aussi d’ailleurs, dans les psaumes:
«Heureux l'homme … qui a son plaisir dans la loi du Seigneur, et qui la médite jour et nuit. II est comme un arbre planté près d'un cours d'eau qui donne son fruit en son temps, et dont le feuillage ne se flétrit pas…» (Ps1, 1-3).
L’arbre est ordinairement composé de trois parties:
La force et la résistance de l’arbre sont en fonction de la profondeur de sa racine principale et de l’étendue des racines secondaires. Par ailleurs, la vie d’un arbre lui est assurée par la sève qu’il reçoit de ses racines. Ainsi, sa vie et sa survie dépendent fondamentalement de ses racines. Car en effet, tant que ses racines sont vivantes, le tronc peut bourgeonner et les rameaux redonner des feuilles. Ainsi, que dire?
Le système financier international est comparable à un arbre qui a pour couronne l’argent-dette pratiqué par le système bancaire, le gouvernement mondial et les institutions qui le manifestent progressivement, l’abondance perverse comme dérive du capitalisme (vicié), les guerres et la famine entretenues; à son tronc, un homme qui prétend prendre la place de Dieu, qui est esclave de lui-même, de l’argent; à la racine, l’esprit du mal, Satan, les Illuminati non pas comme personnes mais comme esprit et système de domination et de destruction. La sève qui nourrit ce système c’est le mensonge constitué en système, le mépris de la personne, l’individualisme, le relativisme moral, les doctrines et pratiques économiques et sociales perverses…
Le Crédit Social est comme un arbre qui a pour couronne l’argent sans dette (par le gouvernement), le dividende pour tous et l’escompte compensé (principe de l’équilibre économique du système et de maîtrise de l’inflation); au tronc de cet arbre, un homme libre et établi dans sa dignité telle que voulue par Dieu, l’homme vivant. A la racine de cet arbre, le Christ qui est victorieux de Satan et gage de notre propre victoire, Marie (nouvelle Ève) qui est annoncée depuis la Genèse pour écraser la tête de Satan; Saint Michel qui a la vocation de lutter au quotidien contre l’esprit du mal. La sève qui nourrit cet arbre est constituée de la Parole de Dieu, de la Doctrine sociale de l’Église (bien commun, dignité de la personne, solidarité, subsidiarité) et des grâces divines qui soutiennent l’existence chrétienne.
Le combat est essentiellement spirituel, d’où la place de la prière comme on le voit ici à l’Institut Louis Even.
La cible du combat n’est pas l’homme, créature aimée de Dieu, mais l’esprit du mal, la racine et la sève du système qui oppriment et oppressent l’homme.
L’objet de notre combat c’est l’homme dont la dignité est menacée et atteinte, où qu’il soit et qui qu’il soit.
En conclusion, j’entends résonner en moi, le cri de réveil de tous les matins de cette session d’étude: «Ave Maria, debout pour le combat». Le combat de la foi, de l’espérance et de l’amour, le combat pour la «promotion de tout homme et de tout l’homme» selon les termes du pape Paul VI, le combat pour qu’un nouveau système soit mis en place, et qu’enfin l’économie joue son vrai rôle (que les biens produits rejoignent les besoins et que tous y aient accès équitablement). C’est aussi le combat pour raviver la flamme divine qui existe dans chaque homme (créé à l’image et à la ressemblance de Dieu) et que les mensonges de notre temps travaillent vainement à l’extinction totale et définitive, un combat dont la victoire nous est d’avance assurée par le Christ, et il ne reste qu’à en faire une réalité actuelle. Entre-temps se mettre debout et partir en mission est un appel à l’impératif.
Et le passage d’une «pastorale de simple conservation à une pastorale vraiment missionnaire» prôné par le Pape François dans Evangelii Gaudium n°15 peut trouver ici toute sa pertinence. Cela peut aller jusqu’au porte-à-porte. En tout cas, on ne peut plus attendre. Alors, «Guerrier valeureux, porte l’épée de noblesse et d’honneur! Ton honneur, c’est de courir au combat, pour la vérité, la clémence et la justice; et que ta droite te fasse accomplir des faits merveilleux. (Ps 45, 4-5)
Abbé André Nicaise Tehoua