Le traité de Maastricht signifie la fin de la souveraineté des pays
L'Europe des nations ne doit pas devenir l'Europe des régions
par Alain Pilote
Le 7 février 1992, les douze pays membres (d'alors) de la Communauté Économique Européenne signaient à Maastricht, aux Pays-Bas, un traité instituant l'Union Européenne, communément appelé Traité de Maastricht. Ce traité prévoit l'établissement d'une monnaie et banque centrale uniques, ainsi qu'une politique étrangère et de sécurité commune pour tous les pays membres, avec comme objectif ultime d'en arriver à une union politique, un super-État européen, qui pourrait être appelé « États-Unis d'Europe », tout comme existent les États-Unis d'Amérique.
La France, par exemple, ne serait plus un pays, mais une région, ou province d'Europe, ayant cédé tous ses pouvoirs de nation souveraine à une autorité centrale, la Commission européenne. Cette Commission européenne, située à Bruxelles, en Belgique, est composée de vingt commissaires qui « sont tenus d'agir en toute indépendance vis-à-vis de leurs gouvernements nationaux », et de 15 000 fonctionnaires (dont 5000 pour la traduction).
Il existe actuellement trois grandes régions ou blocs économiques dans le monde : l'Europe, l'Amérique du Nord et l'Extrême-Orient (Japon, Corée du Sud, Taiwan, etc.). Si, sous prétexte de devoir s'unir afin de pouvoir faire compétition aux deux autres blocs économiques, les pays membres de chacun de ces trois blocs décident de se fusionner en un seul pays, formant ainsi trois super-États, alors l'objectif d'un gouvernement mondial un seul pays pour toute la planète sera presque atteint.
Cette idée de trois super-États pour en venir à un seul gouvernement mondial est promue par la Commission Trilatérale, un organisme fondé aux États-Unis en 1973 par David Rockefeller, président de la Chase Manhattan Bank de New-York. Le but officiel de cette commission est « d'harmoniser les relations politiques, économiques, sociales et culturelles entre les trois grandes régions économiques du globe » (d'où le nom de « Trilatérale »). Des traités du même esprit que celui de Maastricht existent pour les autres régions du monde, dont l'ALENA (Accord de Libre-Échange Nord-Américain), qui inclut déjà les États-Unis, le Canada et le Mexique, et qui prévoit inclure tous les pays d'Amérique du sud d'ici dix ans (le Chili vient tout juste de se joindre à cet accord).
L'aspect le plus important et le plus dangereux du traité de Maastricht est sans contredit l'introduction d'une monnaie unique l'euro pour tous les pays membres d'Europe, d'ici 2002. En 1998, on décidera quels pays d'Europe feront partie de l'union monétaire (ceux ayant un déficit inférieur à 3% de leur produit intérieur brut), en 1999 commenceront à circuler les premiers billets et pièces de monnaie en euro, émis par la Banque centrale européenne, et d'ici janvier 2002, toutes les administrations européennes devront avoir fait le passage à l'euro.
Au plus tard le 1er juillet 2002, toutes les monnaies nationales le franc français, le mark allemand, la lire italienne, etc. perdront leur statut de monnaie légale, et cesseront d'exister. La seule monnaie qui aura cours légal en Europe sera l'euro, émis par la Banque centrale européenne. Seule cette Banque centrale européenne aura le droit d'émettre l'argent pour les pays d'Europe, et elle le fera indépendamment de tout contrôle démocratique, les gouvernements nationaux n'ayant absolument aucun droit de lui dicter quoi que ce soit.
L'abandon par les pays d'Europe de leur monnaie nationale signifie pour eux la fin de toute souveraineté économique, et est même un acte de trahison envers leurs citoyens. En effet, celui qui contrôle l'émission de la monnaie d'une nation contrôle éventuellement toutes les politiques de cette nation.
Ceux qui comprennent les principes du Crédit Social savent tout le mal qu'une monnaie unique pour l'Europe signifie. Avec un système d'argent honnête, tel que préconisé par le Crédit Social, l'argent doit être émis par chaque nation, et être un fidèle reflet des réalités physiques : l'argent doit être émis selon la production, et retourner à sa source (la banque centrale de la nation) selon la consommation, pour qu'il y ait toujours un équilibre constant entre l'argent et la production (autant d'argent que de produits, ni plus ni moins), pour empêcher toute inflation des prix.
Aujourd'hui les banques privées ont usurpé ce pouvoir souverain de créer l'argent (les banques centrales des pays occidentaux créant moins de 5% de tout l'argent de la nation), et cherchent à consolider leur pouvoir. En prêtant non pas du papier-monnaie mais de l'argent « scriptural » (chèques, ou chiffres n'existant même pas sur papier, mais seulement dans des cartes à puce et dans les ordinateurs, sous forme de signal électronique), les banques privées peuvent prêter plusieurs fois l'argent de papier-monnaie qu'elles ont réellement en réserve (au Canada, elles prêtent 100 fois leurs réserves, et aux États-Unis, 40 fois).
Les banques chargent un intérêt sur cet argent qu'elles créent d'une seule goutte d'encre (ou d'une seule touche sur un clavier d'ordinateur), alors que la valeur de cet argent est basée sur la production du pays, qui n'appartient pas aux banquiers, mais à toute la population du pays dans son ensemble. Ce que les lecteurs réguliers de Vers Demain savent depuis longtemps, et que tout citoyen devrait savoir, c'est qu'il est tout à fait ridicule, insensé, et criminel pour un pays d'emprunter à intérêt de banques privées de l'argent qu'il peut créer lui-même, sans intérêt. Attention, on ne parle pas d'émettre de l'argent n'importe comment, mais selon la quantité de produits existants.
Alors, les gouvernements pourraient financer sans intérêt tous les besoins de la nation, et n'auraient plus d'intérêt à payer sur leurs dettes, puisqu'ils cesseraient de s'endetter. Si survenait la moindre catastrophe naturelle nécessitant de l'aide financière pour la population et pour la reconstruction, le gouvernement souverain de chaque nation pourrait le faire en se servant de sa propre banque centrale et créer de l'argent sans intérêt, alors qu'avec le présent traité de Maastricht, il est interdit à tout gouvernement de décider la moindre aide.
L'objectif des banques privées n'est pas du tout d'émettre l'argent selon les besoins de la population, mais de faire plus de profits, et d'amener gouvernements, entreprises et individus à s'endetter encore davantage. L'oligarchie des banquiers sait très bien que si un seul pays reprend en main le contrôle de l'émission de sa monnaie, cela porterait un coup mortel à leur monopole de la création du crédit, car ce pays donnerait au monde entier l'exemple qu'un pays peut fonctionner sans emprunter des banques privées, et tous les autres pays emboîteraient le pas. C'est pourquoi en installant une seule banque centrale pour tous les pays d'Europe, les banquiers rendent alors impossible toute libération financière pour quelque pays d'Europe que ce soit.
De plus en plus d'« euro-sceptiques » se rendent compte que le bien commun de la population ne peut être servi par l'abandon des monnaies nationales au profit d'une monnaie unique, et que les seuls bénéficiaires de cette monnaie unique seront les banquiers et autres spéculateurs du Fonds Monétaire International et de la Banque mondiale. Ce n'est pas la population qui a demandé cette monnaie unique, mais les politiciens, vendus aux puissances financières, veulent l'imposer de force.
Dans sa déclaration publique du 14 juillet 1997, le président français Jacques Chirac suppliait le nouveau premier ministre Lionel Jospin de « respecter la date et les conditions » pour le passage à la monnaie unique. « Ne pas le faire aurait pour la France des conséquences très graves. Nous nous isolerions. » ajoutait-il. En réalité, la France ne ferait que s'isoler du système de vol des banquiers. Où est le mal là-dedans ? Ne pas joindre l'union monétaire n'aurait de conséquences très graves que pour les banquiers seulement, pas pour la population française, puisque les banquiers perdraient leur contrôle sur la France !
Pourquoi fermer des hôpitaux, réduire les services publics ou les privatiser, alors que les possibilités physiques de fournir ces services matériaux et main-d'œuvre existent ? Avec un système d'argent honnête, il serait possible de financer sans intérêt et sans dette tout ce qui est physiquement réalisable, pour répondre aux besoins de la population. Les citoyens d'Europe doivent donc s'opposer à la monnaie unique. Non à l'euro, non au traité de Maastricht, et oui à une monnaie honnête et nationale, émise sans dette, oui au Crédit Social !