Le 19 juin 2018, le Sénat canadien approuvait le projet de loi C-45 sur la légalisation du cannabis (drogue aussi appelée « pot » ou « marijuana », concrétisant ainsi une des promesses du premier ministre canadien Justin Trudeau. Le gouvernement canadien prétend que ce geste diminuera la consommation de cette drogue, mais plusieurs autorités, y compris les provinces et les corps policiers, ont émis des craintes à ce sujet, prévoyant que cette légalisation sera dommageable pour la société. Les évêques canadiens ont aussi fait part de leurs craintes, dans la déclaration suivante :
La Conférence des évêques catholiques du Canada (CECC) exprime sa déception à la suite de l’adoption de la loi C-45, qui légalise le cannabis (marijuana) à des fins récréatives. Étant donné les nombreux risques connus que pose l’usage du cannabis à la société humaine et à la santé humaine (physique, mentale et émotionnelle), il est déplorable que le gouvernement fédéral ait décidé de faciliter l’offre et la consommation d’une substance qui entraîne la dépendance et qui aura des effets désastreux pour une multitude de personnes.
L'Association médicale canadienne, l'Association des psychiatres du Canada et la Société canadienne de pédiatrie ont souligné les liens entre l’usage du cannabis et les dépendances, la dépression, l’anxiété, la psychose, les entraves au développement du cerveau, ainsi que des problèmes pulmonaires tels que l’asthme et l’emphysème. L’UNICEF est d’avis que les jeunes du Canada sont les plus fréquents consommateurs de marijuana du monde développé, et la légalisation du cannabis à des fins récréatives ne restreindra pas l’accès des jeunes à la marijuana et n’en diminuera pas la consommation par les jeunes, contrairement à ce que le gouvernement a prétendu.
Les chefs de police du Canada, ainsi que de nombreux leaders autochtones, provinciaux et municipaux, continuent de souligner le besoin d’un financement additionnel pour faire respecter la nouvelle loi, et tous ne sont pas convaincus qu’elle réduira les activités du crime organisé, mais plutôt qu’elle pourrait même avoir l’effet contraire. La légalisation n’est pas nécessaire parce qu’il est difficile de faire respecter la loi. Il y aura toujours des plaies sociales qui seront difficiles à éliminer, mais la réponse ne peut certainement pas être de capituler en les approuvant ou en les légalisant. Au contraire, comme l’a recommandé l’Académie pontificale des sciences, les solutions au trafic des drogues, aux dépendances et aux abus résident dans les possibilités d’éducation et d’emploi, le soutien communautaire aux personnes vulnérables, le traitement, la prévention et les services médicaux, le soutien de la famille, la restriction de l’approvisionnement en drogues, la dissuasion de la consommation de drogues et la promotion de programmes de désintoxication.
La position de la CECC est également celle du pape François, qui a signalé que « les légalisations de ce que l’on appelle les “drogues douces”, même partielles, sont non seulement discutables sur le plan législatif, mais ne produisent pas les effets qu’elles s’étaient fixés. » (Discours aux participants à la 31e « International Drug Enforcement Conference », Rome, 20 juin 2014.) L’augmentation massive de consommation du cannabis qui accompagnera sa légalisation ne produira pas une société plus juste et plus humaine, mais ne fera qu’aggraver ou multiplier des problèmes déjà très répandus dans la société, y compris la maladie mentale, le crime, le chômage, l’éclatement des familles, les blessures et les accidents mortels résultant de la conduite avec facultés affaiblies, et la dépendance accrue aux drogues plus « dures » avec les problèmes connexes résultant des surdoses.
Pour citer une déclaration antérieure de la CECC, « Déclaration sur la crise des opioïdes et de la toxicomanie au Canada », la légalisation de la marijuana « est potentiellement dangereuse. Les risques importants pour la santé associés à l’usage du cannabis sont largement reconnus, surtout chez les jeunes. Ils comprennent un risque accru de crise cardiaque, d’AVC, toutes les pathologies respiratoires et cancérigènes associées à la fumée du tabac, et une multitude de troubles psychiatriques, dont la schizophrénie. Des études ont démontré que la marijuana sert souvent de “drogue d’initiation”, soulignant la tendance des utilisateurs d’en consommer en combinaison avec d’autres substances licites ou illicites, y compris certaines qui pourraient être plus dangereuses. À un moment où tant de ressources sont engagées pour décourager l’utilisation récréative du tabac, il est difficile de comprendre l’indifférence pour la santé publique qu’engendrait la légalisation de la marijuana, qui est vraisemblablement beaucoup plus nocive. »
Conférence des évêques catholiques du Canada
25 juin 2018