150e anniversaire de l’apparition de Notre-Dame à Pontmain

le lundi, 01 mars 2021. Dans Apparitions et miracles

« Mais priez, mes enfants… Mon Fils se laisse toucher »

Notre-Dame de Pontmain

La France, fille aînée de l’Église, a été une terre particulièrement choyée par la sainte Vierge Marie, qui y est apparue cinq fois au 19e siècle, et ces apparitions ont toutes été reconnues officiellement par l’Église : Paris, en 1830, où Marie est apparue à sainte Catherine Labouré à la chapelle de la rue du Bac pour lui révéler la Médaille miraculeuse ; La Salette, en 1846, où Marie est apparue à deux petits bergers, Mélanie Calvat et Maximin Giraud ; Lourdes, en 1858, où Notre-Dame est apparue à sainte Bernadette Soubiroux en déclarant : « Je suis l’Immaculée Conception » ; Pontmain, en 1871 ; Pellevoisin, en 1876. Fait particulier : si on relie les cinq endroits où la Vierge Marie est apparue pendant ce siècle, on obtient la lettre M… pour Marie !

Dans cet article, nous allons parler tout spécialement de l’apparition de Notre-Dame à Pontmain, petit village d’environ 800 habitants dans le diocèse de Laval et le département de la Mayenne, au nord-ouest de la France, car nous célébrons en 2021 le 150e anniversaire de l’apparition, qui eut lieu le 17 janvier 1871.

La guerre franco-prussienne

Depuis juillet 1870, la France est en guerre contre une coalition d’États allemands, ce qu’on appellera la guerre franco-prussienne. Le 19 juillet, Napoléon III avait déclaré la guerre à la Prusse et depuis, les défaites se succédaient. L'Empereur avait capitulé le 2 septembre, Paris était assiégé par l'ennemi, l'armée de l'Ouest était battue au Mans le 13 janvier, et elle se repliait en désordre ; une grande partie de la France était occupée : il ne restait plus aucun espoir humain d'arrêter l'invasion.

Après la défaite du Mans, l'inquiétude augmenta dans l'Ouest ; les troupes françaises battaient en retraite en direction de la Bretagne. Le soir du 17 janvier, le général allemand Von Schmidt disait : « En ce moment, mes troupes sont à Laval ». Elles étaient, en effet, aux portes de la ville et avaient reçu l'ordre de la prendre ; celle-ci ne pouvait résister. Or, Laval est à 52 kilomètres de Pontmain.

L'angoisse régnait à Pontmain. Depuis le 23 septembre 1870, 38 hommes ou jeunes gens étaient partis à la guerre. Monsieur le Curé Michel Guérin les y avait préparés. Après la messe qu'il avait célébrée pour eux le jour du départ, il les avait bénis, consacrés à la Sainte Vierge, et leur avait promis qu'ils reviendraient tous ; mais, depuis plusieurs jours, on était sans nouvelles de la plupart d'entre eux. L'angoisse était telle que le 15 janvier, après les vêpres à l’église paroissiale, personne n'avait eu le courage d'entonner le cantique habituel : « Mère de l'Espérance ». Mais l'abbé Guérin avait su trouver dans son cœur les paroles de foi et de confiance qui raniment le courage : la prière et les chants s'étaient finalement élevés comme de coutume. Puisque toutes les espérances et les consolations humaines semblaient perdues, ne fallait-il pas se tourner vers Dieu ?

Dieu, en effet, allait « se laisser toucher » par l'intervention de sa Mère à qui l'on recourait de toutes parts. C'est sa Mère aussi, que Dieu allait choisir pour apporter le message d'espérance et l'assurance d'être exaucé en peu de temps. C'est à Pontmain qu'elle allait apporter ce message. On y priait tellement !

L’abbé Michel GuérinL’abbé Michel Guérin

Au départ des soldats, Monsieur le Curé avait demandé à ses paroissiens de venir à la messe, chaque jour si possible. Son appel avait été entendu ; l'assistance était nombreuse et, après la messe, on priait encore pour la France et les soldats. La paroisse était devenue une véritable communauté priante, dans laquelle chaque famille voulait avoir sa place.

Il est important de préciser le travail accompli dans la paroisse par l’abbé Michel Guérin. Dès son arrivée à Pontmain, le 24 novembre 1836, il intronise une statuette de la Sainte Vierge dans tous les foyers. C’est à partir de ce moment-là que dans chaque famille, on prie le chapelet tous les jours. À partir du 8 décembre 1854 (définition du Dogme de l’Immaculée Conception), quatre bougies sont allumées sur l’autel de la Vierge à tous les offices de la paroisse. (Il sera fait mention plus loin dans l’apparition de Marie de quatre bougies…)

Les enfants priaient peut-être encore plus que leurs parents. Monsieur le curé ne se lassait pas de leur redire : « Priez, mes enfants, vous obtiendrez miséricorde ; et surtout, demandez par Marie ». Parmi les enfants, les deux petits Barbedette, Eugène et Joseph, se distinguaient par leur piété. Chaque matin, après une courte prière et le travail avec leur père, ils récitaient le chapelet à haute voix pour leur frère (parti à la guerre), avant le déjeuner. Depuis le début de la guerre, ils allaient chaque jour à l'église faire le chemin de croix, pour demander la cessation des hostilités. Ils servaient ensuite la messe de 7 heures et s'unissaient encore aux prières pour les soldats. La classe sonnait à 8 heures. Là encore, les religieuses les faisaient prier et chanter des cantiques pour obtenir la miséricorde divine. Ainsi se passa la journée du 17 janvier 1871.

L’apparition de Marie

Notre-Dame de PontmainArrive le fameux soir du 17 janvier… et l’apparition de Marie. Ce soir-là, deux enfants, Eugène et Joseph Barbedette, aident leur père, dans la grange, à piler les ajoncs pour la nourriture de la jument. La nuit est tombée. Il est environ 5 heures et demie. Eugène profite de l’arrêt du travail pour sortir à la porte « voir le temps ». Et voilà que tout à coup, en plein ciel, au-dessus de la maison d’en face, il voit une « Belle Dame » qui tend les bras comme dans un geste d’accueil et qui lui sourit. Elle est vêtue d’une robe bleue semée d’étoiles d’or (comme la voûte de l’église peinte ainsi en 1860). Sur la tête, elle a un voile noir surmonté d’une couronne d’or avec un liseré rouge au milieu. Aux pieds, elle porte des chaussons bleus avec une boucle d’or. Elle est au milieu d’un triangle formé de trois grosses étoiles. L’enfant sourit à la Belle Dame. Ce sourire sera le seul dialogue car, de toute l’apparition, la Belle Dame ne dira pas un seul mot.

Le jeune frère Joseph, venu à la porte, voit lui aussi la « Belle Dame » tandis que les grandes personnes ne voient rien sinon les trois étoiles. Victoire, leur mère, ne verra rien non plus, bien qu’elle soit retournée à la maison chercher ses lunettes. Elle se rend à l’école demander à sœur Vitaline de venir devant la grange.

Ne voyant que les étoiles, la sœur retourne à l’école et en revient avec une autre sœur, Marie-Edouard, et trois petites pensionnaires. À leur arrivée, les deux plus jeunes, Françoise Richer et Jeanne-Marie Lebossé s’écrient : « Oh ! La belle Dame ! Qu’elle est belle ! » et la décrivent à leur tour. Sœur Marie-Edouard s’en va prévenir M. le curé tandis que sœur Vitaline commence à prier avec les gens qui accourent de plus en plus nombreux.

« M. le curé, dit sœur Marie-Edouard depuis la porte du presbytère, venez vite chez les Barbedette, il y a un prodige : les enfants voient la Sainte Vierge ! » Et M. le curé Guérin, saisi par la surprise, répond : « Un prodige ! La Sainte Vierge ! La Sainte Vierge ! Mais, ma sœur, vous me faites peur ! » La vieille servante, Jeannette Pottier, intervient : « Faut aller voir, M. le curé ! » et elle allume la lanterne pour sortir dans la nuit.

Lorsqu’il arrive au milieu de ses paroissiens, les enfants, que l’on avait séparés pour éviter qu’ils puissent communiquer entre eux, s’écrient : « V’là d’qué qui s’fait ! » (voilà quelque chose qui se fait) et ils décrivent un grand ovale bleu qui est venu entourer la Belle Dame. À l’intérieur quatre bobèches sont fixées portant quatre bougies éteintes. Ces bougies rappellent celles que l’abbé Guérin allumait sur l’autel de la Sainte Vierge depuis le 8 décembre 1854 à tous les offices de la paroisse. En même temps apparaît une petite croix rouge sur la robe, à l’endroit du cœur.

Basilique de PontimainLa basilique de Pontimain, et à gauche, l’église paroissiale du temps de l’apparition. Après la mort de l’abbé Guérin en 1872, Mgr Wicart confie aux Missionnaires Oblats de Marie Immaculée la construction d’un Sanctuaire, qui sera achevé en 1890, consacré en 1900, puis érigé en basilique par le pape Pie X en 1905.

Et puis voilà que l’attention se relâche. On commence à parler, à discuter et la Belle Dame devient triste : « V’là qu’elle tombe en humilité » dit Eugène. « Prions » ajoute M. le curé. Sœur Marie-Édouard commence le chapelet. Aussitôt, la Dame sourit à nouveau. Tout au long du chapelet, au rythme des Ave Maria, la Belle Dame grandit lentement. L’ovale grandit dans les mêmes proportions et les étoiles se multiplient sur sa robe et autour d’elle.

« C’est comme une fourmilière, ça se tape sur sa robe, disent les enfants. Oh ! Qu’elle est belle ! » Après le chapelet, on chante le Magnificat. Au début du chant, les enfants s’écrient : « V’là cor’de qué qui s’fait » (voilà encore quelque chose qui se fait). Une grande banderole vient se dérouler entre le bas de l’ovale et le toit de la maison. Des lettres commencent alors à s’écrire, en majuscule, couleur d’or. « C’est un M » – « Un A » – « un I » – « un S ». Le mot MAIS qui va rester tout seul jusqu’au moment où arrive Joseph Babin, un charretier, qui revient d’Ernée, à 20 km de là, et qui lance à la foule : « Vous pouvez bien prier, les Prussiens sont à Laval ». Le mot PRIEZ vient s’écrire alors après MAIS. Le message continue de s’écrire lettres après lettres. À la fin des litanies que l’on chante après le Magnificat, les enfants peuvent lire une première ligne se terminant par un gros point :

MAIS PRIEZ MES ENFANTS DIEU VOUS EXAUCERA EN PEU DE TEMPS•

Au début de l’Inviolata qui va suivre, des lettres commencent une seconde ligne : MON. Au moment où l’on chante « O Mater alma Christi carissima », le mot FILS vient s’écrire à la suite. « MON FILS » lisent les enfants. Alors c’est un cri de joie général : « C’est Elle ! C’est bien Elle ! C’est la Sainte Vierge ! » Jusque là, on pensait que ce pouvait être Elle. Mais maintenant, on en est sûr. C’est bien écrit : MON FILS. Pendant que l’on termine l’Inviolata et que l’on chante le Salve Regina, le message continue et se termine

MON FILS SE LAISSE TOUCHER

Il n’y a pas de point final mais cette deuxième ligne est soulignée par un gros trait d’or comme les lettres.

« Chantons notre cantique à Marie » dit alors M. le curé et les paroles s’élèvent joyeuses vers le ciel, alors que, dimanche dernier, on l’avait chanté la gorge serrée :

« Mère de l’Espérance dont le nom est si doux Protégez notre France. Priez, priez pour nous. »

Au début, la Vierge lève les mains à hauteur de ses épaules et agite les doigts au rythme du cantique. Puis un rouleau « couleur du temps » passe et efface la banderole et le message.

Suit un autre cantique « Mon doux Jésus » avec le refrain « Parce Domine, parce populo tuo ». Les enfants, joyeux jusque-là, deviennent subitement tout tristes. C’est que la Vierge elle aussi est devenue toute triste. Elle ne pleure pas mais un frémissement au coin des lèvres marque l’intensité de sa douleur. « Jamais on n’a vu une pareille tristesse sur un visage humain » disent les enfants.

C’est alors qu’une croix d’un rouge vif apparaît devant la Vierge. Sur la croix, Jésus, d’un rouge plus foncé. Au sommet de la croix, sur une traverse blanche, est écrit : JÉSUS CHRIST. La Vierge prend la croix à deux mains et la présente aux enfants pendant qu’une petite étoile vient allumer les quatre bougies de l’ovale avant d’aller se placer au dessus de la tête de la Vierge. La foule prie en silence et beaucoup pleurent.

Puis sœur Marie-Edouard chante l’Ave Maris Stella. Le crucifix rouge disparait et la Vierge reprend l’attitude du début. Le sourire « un sourire plus grave » revient sur ses lèvres et une petite croix blanche apparaît sur chacune de ses épaules. Il est 8 h ½.

« Mes chers amis, dit M. le curé, nous allons faire tous ensemble la prière du soir ». Tout le monde se met à genoux, là où il est, qui dans la neige, qui dans la grange pour ceux qui ont voulu s’abriter du froid glacial. Jeannette Pottier, la vieille servante, commence la prière : « Mettons-nous en présence de Dieu et adorons-le. » Au moment de l’examen de conscience, les enfants signalent la présence d’un voile blanc qui vient d’apparaître aux pieds de la Vierge et qui monte lentement en la cachant à leurs yeux. Le voile arrive à hauteur de la couronne, s’arrête un instant et, brusquement, tout disparaît : le voile, la couronne, l’ovale, les bougies et les trois étoiles.

« Voyez-vous encore ? » demande M. le curé. « Non, M. le curé, tout a disparu, c’est tout fini ! ». Il est près de 9 h. Chacun rentre chez soi, le cœur en paix. Toute crainte, toute peur s’en est allée.

Les Prussiens qui devaient prendre Laval ce soir-là n’y sont pas entrés. Le lendemain, ils se sont repliés. L’armistice est signé le 25 janvier. Les 38 jeunes de Pontmain reviennent tous sains et saufs.

Le lendemain de l’apparition, M. le curé Guérin rédige un rapport des événements qu’il envoie à l’évêque. Le 2 février 1872, après l’enquête et le procès canonique, Mgr Wicart, évêque de Laval publie un mandement dans lequel il déclare : « Nous jugeons que l’Immaculée Vierge Marie, Mère de Dieu, a véritablement apparu le 17 janvier 1871 à Eugène Barbedette, Joseph Barbedette, Françoise Richer et Jeanne-Marie Lebossé dans le hameau de Pontmain. »

M. le curé Michel Guérin est décédé le 29 mai 1872. En juin 2013 eut lieu l’ouverture du procès en vue de sa béatification par Mgr Thierry Scherrer, évêque de Laval.

Que sont devenus les quatre voyants

Voyants de Pontmain : Eugène, Joseph, Françoise et Jean-MarieEugène, Joseph, Françoise et Jean-Marie

Eugène Barbedette, né le 4 novembre 1858, est le premier à apercevoir la Belle Dame. Il devient prêtre, et est ordonné en 1883. Curé dans plusieurs paroisses du diocèse de Laval, il a laissé le souvenir d’un prêtre « droit, zélé, fervent et intransigeant ». Il meurt le 2 mai 1927.

Joseph Barbedette, né le 20 novembre 1860, désire devenir missionnaire. Il entre chez les Missionnaires Oblats de Marie Immaculée, et est ordonné prêtre en 1884. À la demande de ses supérieurs, il écrit un récit très complet de l’apparition. Il meurt le 3 novembre 1930, et est enterré dans le cimetière de Pontmain.

Françoise Richer est née en 1861. Elle reste ce qu’elle est au moment de l’apparition : une âme profondément chrétienne, accomplissant simplement sa tâche de chaque jour « pour faire plaisir au Bon Dieu et à la Bonne Vierge ». Elle gagne sa vie comme domestique puis comme institutrice dans plusieurs petites écoles de campagne. Vers 1900, elle devient gouvernante de l’abbé Eugène Barbedette. Elle meurt le 28 mars 1915.

Jeanne-Marie Lebosse est née le 12 septembre 1861 à Gosné (Ille-et-Vilaine). Orpheline de père et ayant sa mère paralysée, elle est recueillie par sa tante Sœur Timothée, directrice de l’école de Pontmain. En 1881, elle entre chez les Sœurs de la Sainte Famille de Bordeaux. Pendant dix ans, elle sera paralysée, et en mars 1933 elle sera réduite à une impuissance absolue. Elle meurt le 12 décembre 1933.

Prière pour la paix à Notre-Dame de Pontmain

« Très douce Vierge Marie, tu as dans ton apparition à Pontmain, rappelé l’importance de la prière, fortifié en nos cœurs l’Espérance et apporté la Paix. Daigne accueillir favorablement aujourd’hui la prière ardente que nous t’adressons pour que s’établisse dans nos cœurs, nos familles, notre Nation et toutes les Nations, la Paix, fruit de la justice, de la vérité, de la charité. Augmente en nos âmes le désir de vivre pleinement notre foi, sans aucune compromission, dans toutes les circonstances de notre vie. Aide-nous à toujours comprendre les autres et à les aimer profondément en Dieu. Amen. »

Sources : www.sanctuaire-pontmain.com
Chanoine Foisnet, Notre Dame de PontMain, Belles histoires belles vies, éditions Fleurus

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