Centralisation

Gilberte Côté-Mercier le vendredi, 01 août 1941. Dans Éditorial

Une pile électrique centrale qui communique des idées à deux têtes, deux chefs différents.

La première tête, à droite de la pile, reçoit le courant positif. Elle approuve toujours. On dit que c'est le parti au pouvoir.

La seconde tête, à gauche de la pile, reçoit le courant négatif. Elle proteste toujours. On dit que c'est le parti de l'opposition.

L'une positive, l'autre négative. Les deux dirigées vers un même objectif dicté par la même pile centrale, qu'on sait être la Haute Finance.

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Chacune des deux têtes communique avec plusieurs corps d'hommes, qu'on est convenu d'appeler des députés parce qu'ils sont choisis par une élection populaire.

Une tête centrale pour plusieurs corps ayant chacun tous leurs membres au complet, sauf justement la tête.

La tête centrale, comme la pile centrale, dirige tout le groupe qu'elle contrôle. Elle dicte à tous les bras, à toutes les jambes les faits et gestes à accomplir. On n'est donc aucunement surpris de voir tous ces corps sans têtes agir toujours uniformément, ne présentant dans leur vivacité à répondre à la direction qu'une différence de degré, due sans doute à leur différence de volume, car les uns sont, physiquement, plus gros que les autres. Avant de les soumettre à la discipline de la tête unique, on avait pris soin, il va de soi, de leur enlever l'esprit, puisqu'on leur avait coupé la tête, mais on avait négligé de standardiser leurs corps. On a considéré avec raison que la chose était de peu d'importance.

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Récapitulons.

Une direction unique pour deux têtes.

Une tête unique pour plusieurs corps.

Magnifique centralisation dans nos parlements.

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Mais, ce n'est pas tout. Nos différents parlements eux-mêmes sont centralisés, en une hiérarchie merveilleuse.

Les municipalités ont déjà remis leurs droits entre les mains des provinces.

Les provinces perdent tous les jours le peu d'autonomie qui leur restait.

Et le pays tout entier est dans les griffes du monopole international de l'argent, et prêt à sacrifier à une centrale américaine jusqu'au droit même de reprendre ses droits.

Divine centralisation, où donc t'arrêteras-tu ?

Gilberte Côté-Mercier

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