"Une piastre, c'est dur !"

Gilberte Côté-Mercier le vendredi, 15 août 1941. Dans Réflexions

Une assemblée du Crédit Social à Macamic, Abitibi.

Après l'assemblée, les membres de l'I.A.P. circulent dans les rangs pour solliciter l'abonnement.

L'un d'eux, s'adressant à un colon : "Êtes-vous abonné, monsieur ?"

— Non, monsieur.

— Vous abonnez-vous ce soir ?

Le colon regarde sa femme d'un air interrogatif. Elle fait signe que oui, douloureusement. Lui, lentement, très lentement, sort de sa poche son porte-monnaie ; encore très lentement retire de son porte-monnaie le rectangle béni de tous ; puis, le remet au solliciteur en disant : "Une piastre, c'est bien dur !"

♦ ♦ ♦

En effet, c'est dur, pour un colon, de donner une piastre. Pourtant, il la donne quand même.

Sa part de sacrifice pour sortir de l'abîme, elle est grande. Il la fait quand même.

Le colon, il a du courage, lui, un courage à toute épreuve, mesuré aux grands arbres de la forêt qu'il a vaincus.

Et s'il a du cœur pour se tirer lui-même de la peine, il en a aussi pour en tirer les autres. Le colon a conquis au pays un grand domaine. Il ne se contente pas de cette générosité. Maintenant c'est la liberté qu'il veut conquérir pour son pays. Vive le colon, ce pionnier, ce héros !

Puisse-t-il être un exemple pour nos bourgeois engourdis !

Si le bourgeois continue à se gaver de son égoïsme et à refuser son aide au pays, honte, honte soit à ce serviteur de l'enfer !

Vous, les pauvres, vous avez le droit de le lui dire. Va-t-on pour cela vous accuser d'être des démagogues ?

♦ ♦ ♦

D'un côté, le pauvre qui offre son sacrifice et mérite la miséricorde divine.

De l'autre côté, le riche qui boit le sang du pauvre, et appelle la colère du ciel.

Lequel l'emportera ? Le pauvre qui rachète devant Dieu, ou le riche qui exaspère la Justice ?

Qui donc Dieu entendra-t-il ? Et quel est donc le sort qui est réservé à notre province de Québec ?

D'autres nations sont punies par des révolutions et des guerres.

Envers nous, Dieu exercera-t-il sa Justice ou sa Miséricorde ?

Y a-t-il chez nous assez de pauvres qui se sacrifient pour que Dieu juge notre peuple capable de profiter de la Miséricorde ?

Ou bien y a-t-il chez nous trop de riches égoïstes qui décident Dieu à nous ramener à Lui par les grandes épreuves ?

Bientôt, plus tôt que nous croyons peut-être, nous connaîtrons le jugement de Dieu sur la province de Québec.

Gilberte Côté-Mercier

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