Au hasard des lectures

Louis Even le mardi, 15 avril 1941. Dans En lisant les journaux

Terre-Neuve

On sait que Terre-Neuve, le plus ancien des dominions britanniques lorsqu'il était encore un dominion, perdit son indépendance il y a quelques années, pour redevenir simple colonie de la Couronne. La cause : banqueroute financière. Les Terre-Neuviens n'ayant plus d'argent, ils n'avaient plus droit de garder leur liberté.

M. James Magor, co-directeur avec l'Honorable Bennett de l'Imperial Oil Company, fut envoyé à Terre-Neuve pour mettre de l'ordre dans les finances. En compensation de la perte de leur autonomie, les habitants de Terre-Neuve voyaient accorder à leur île un emprunt par l'Imperial Oil, à condition que cette compagnie eût le monopole de l'huile dans la colonie. Comme quoi ça paie d'être envoyé en mission financière pour mettre au pas même des insolvables.

Mais comment les Terre-Neuviens se trouvent-ils de leur nouveau régime ? L'assainissement financier et la suppression de leur autonomie a-t-elle amélioré leur sort ? Nous ne sommes pas allés voir, mais s'il faut en croire les assertions de Malcolm H. Clark dans Harper's Magazine de février dernier, ce n'est pas des plus roses :

Des aventuriers politiques ont pillé le trésor public. Les ressources de l'île ont été données à des intérêts étrangers. De nombreuses gens dépérissent de sous-alimentation s'ils ne meurent pas tout à fait de faim. 50 pour cent des habitants ont la tuberculose. 40 pour cent sont aux secours directs et touchent chacun $22 pour toute l'année. L'industrie forestière, sous contrôle étranger, a rendu les salaires extrêmement bas. Exploitation brutale du peuple.

Le tableau est noir. Il n'a rien qui nous surprenne. Depuis quand la finance a-t-elle une âme ?

On s'étonnera peut-être de ne pas entendre parler de ces choses. Mais c'est comme chez nous. La misère finit par abrutir et enlever même la force de lever la tête et de crier son indigence.

Puis les journaux s'alimentent surtout où ça paie et ont bien soin de ne pas faire trop de peine à ceux qui commandent les moyens de paiement.

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Un art de politicien

C'est celui, de parler pour ne rien dire.

Cet art est pratiqué par le candidat qui fait de la rhétorique sur les tribunes électorales. Demandez à ses auditeurs ce qu'ils ont appris !

L'art de parler pour ne rien dire atteint un degré de raffinement lorsqu'un ministre répond sans répondre en Chambre. Demandez alors aux députés ce qu'ils ont appris en réponse à une question !

Cette constatation faisait récemment dire à un député fédéral, M. Fleming :

Jusqu'ici, nous avons vu les ministres se lever pour faire des déclarations officielles qui ne signifient pas grand'chose. Un jour que je me trouvais de l'autre côté de la Chambre, j'ai entendu un ministre dire à l'un de ses collègues qui reprenait son siège : "Mes félicitations, vous ne leur avez rien dit." — (Hansard du 6 mars, p. 1469.)

Dans les administrations gouvernementales, on apprend aussi à pratiquer cet art pour recevoir un client. Qui ne connaît la réponse stéréotypée aux quatre-vingt-dix-neuf centièmes des requêtes, des représentations, des délégations : "Votre demande sera prise en sérieuse considération."

Si sérieuse que ça n'aboutit jamais.

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En marge d'une statistique

La statistique des naissances.

À Montréal, d'après un rapport annuel publié par le docteur Adélard Groulx, du Service de santé municipal, le nombre des naissances en 1939 a été de 17,116 sur 900,000 habitants. En 1913, il était de 20,490 sur une population de 515,700 âmes.

Cela veut dire que dans la métropole du Canada, en 1913, le chiffre des naissances était de 39.7 par 1,000 de population. En 1939, il est descendu à 19.02 par 1,000 de population.

Si les naissances avaient été sur la même base qu'en 1913, on aurait enregistré à Montréal, en 1939, 18,000 naissances de plus qu'il y en a eu réellement.

Appliquez à tout le Canada. Il est vrai que, dans le reste du pays, le fléchissement a pu être moins accusé. Mais c'est tout de même une chute de 140,000 naissances par année depuis la crise.

On a fait de longs commentaires sur le fauchage de 60,000 vies canadiennes pendant les quatre années de l'autre guerre. On laisse plus de deux fois ce nombre dans le néant chaque année par suite de la crise. Sans doute qu'il peut y avoir d'autres facteurs, mais celui de la vie rendue horriblement dure, des carrières fermées aux jeunes, du mariage devenu financièrement inabordable, y compte pour un gros point.

Remarquer aussi que, si le nombre des naissances légitimes a fléchi, celui des naissances illégitimes s'est plus que maintenu, il a progressé très sensiblement. "C'est sur le terrain économique que le salut des âmes est en danger." (Benoit XV).

Les mêmes

Le président Roosevelt a choisi M. Averall Harriman pour aller à Londres, voir aux estimations, aux priorités et aux contrats pour la défense. Le Social Crediter de Liverpool du 1er mars fait les commentaires suivants :

"Les Harriman, financiers de New-York, sont plus ou moins le "front gentil" de la maison juive Kuhn, Lœb & Cie. Ils reçurent de Lénine et de Trotsky d'énormes concessions, s'élevant à des milliards de dollars, pour l'industrialisation de la Russie. Les contrats furent exécutés au paradis des Soviets pratiquement par du travail d'esclave, dirigé par des techniciens américains, procurant ainsi un boom américain de prospérité. Évidemment, ce n'est pas trop tôt pour préparer la reconstruction de l'Europe en général, et de l'Angleterre en particulier, par les mêmes canaux et par des méthodes socialistes analogues."

Louis Even

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