La politique - La tyrannie financière à l'oeuvre

Louis Even le vendredi, 15 mai 1942. Dans La politique

La pauvreté au sein de l'abondance

Pendant longtemps, ceux qui contrôlaient les affaires nationales, appuyés par des économistes et des financiers, nous assurèrent qu'il n'y avait pas de quoi se tracasser. Nous étions simplement visi­tés par une crise économique due à différentes cau­ses, y compris les taches solaires et les mauvais pen­chants du peuple en général. Tout ce que nous avions à faire était d'attendre que la tempête pas­se toute seule et nous retrouverions la prospérité souriant au coin de la rue.

Et quels étaient les faits centraux de la situa­tion ? D'une part, la vaste majorité du peuple dans le besoin ; de l'autre, des ressources matérielles et industrielles capables de produire en abondance, des ouvriers s'offrant à l'industrie mais incapables d'obtenir un emploi, des producteurs compétents désireux de fournir les produits demandés par la population mais incapables d'écouler même leur production restreinte.

L'existence de la pauvreté dans de telles condi­tions aurait dû faire comprendre à toute personne d'intelligence même élémentaire qu'un vaste mar­ché non satisfait existait pour la production, mais que la production comme la consommation étaient étouffées par le manque de pouvoir d'achat. Il n'y avait ni problème de production, ni problème de transport, mais seulement un problème de pouvoir d'achat

Pourtant — fait significatif qu'il ne faut pas per­dre de vue — malgré l'évidence des conditions, malgré la demande croissante d'une réforme moné­taire, le système monétaire demeura intact. Il se fit même une propagande laborieuse pour essayer de prouver à tous que, quels que fussent les res­ponsables du désordre et de la détérioration af­freuse entraînée, ce n'était pas le système moné­taire.

Conspiration délibérée

Or, dans les affaires humaines, les choses n'arri­vent pas par simple hasard. Les événements hu­mains sont le résultat d'actes posés par des indi­vidus, hommes ou femmes.

Lorsque l'on constate que sans aucune cause naturelle et en dépit des souffrances imposées à des millions d'êtres humains, les mêmes conditions prévalaient au Canada, aux États-Unis, en Angle­terre, en France, en Australie — dans tous les pays du monde occidental — il n'y a plus moyen de douter de l'existence d'une puissance qui poursuit consciemment une politique uniforme partout où elle étend ses tentacules.

Cette politique, ou plus précisément cet objec­tif,, est facile à exprimer. Il consiste à vouloir dé­pouiller l'individu de sa sécurité économique, le soumettre et le dominer au moyen d'instruments financiers, tels que les dettes, les taxes, les prix non contrôlés par lui et l'incertitude perpétuelle du len­demain ; en même temps, centraliser et consolider le système financier et, par son intermédiaire, con­trôler tous les aspects de la vie économique.

En résumé, la ligne de conduite est tracée pour asservir progressivement des populations entières à une domination financière centralisée. Et les seuls individus capables d'imposer une telle ligne de con­duite sont ceux qui contrôlent les systèmes moné­taires des pays concernés.

Ce contrôle, à la fin de la dernière guerre, était centralisé sur une échelle internationale entre les mains d'un groupe de maisons financières interna­tionales. Les hommes à la direction de ces maisons portent, pour la plupart, des noms à résonance ni française ni anglaise, tels : Kahn, Warburg, Schiff, Schuster, Rothschild.

Quelle fin cherchent donc ces puissances d'ar­gent internationales ? Évidemment, la sujétion complète de tous les peuples à une dictature finan­cière internationale. Leur but est un État universel esclave.

Cependant, aucun groupe ne peut obtenir la do­mination complète du monde sans disposer de cer­tains obstacles. Par exemple, tant que les nations conservent leur pouvoir souverain, soutenu par la force armée pour assurer la mise en vigueur de "la volonté du peuple", la position de tout pouvoir in­ternational usurpé — financier ou autre — demeu­re très précaire.

Attaque contre les démocraties

Le plus grand obstacle en face des puissances monétaires internationales, c'est le droit pour le peuple de voir à ses affaires, d'exprimer sa volonté et de choisir ou révoquer ses gérants ; c'est donc l'existence de régimes démocratiques. C'est pour­quoi on pouvait s'attendre à ce que ces puissances prennent les moyens de saper la force des pays dé­mocratiques, de faire discréditer la démocratie et le nationalisme, de rendre la souveraineté ineffi­cace, avec le dessein ultime d'amener la destruc­tion de toutes ces choses. Et c'est ce qui a eu lieu.

On s'est appliqué pendant des années à ré­duire la démocratie à un simple système social dans lequel le peuple a le droit de voter pour un parti de préférence à un autre, ou pour tels politi­ciens de carrière de préférence à tels autres, mais toujours avec le même résultat : le peuple se voyant invariablement imposer des conditions qu'il ne veut pas.

Sous une démocratie fonctionnant véritable­ment, le peuple obtiendrait les résultats qu'il at­tend de la gestion de ses affaires. Mais, sous la pseudo-démocratie qui a étendu sa main sur nous, le peuple a toujours obtenu l'exact opposé de ce qu'il cherchait. Au lieu du maximum de sécurité économique et de liberté, il est devenu victime du maximum d'insécurité et se voit ravir de plus en plus sa liberté.

En d'autres termes, au lieu de goûter la démo­cratie, on est assujetti à une véritable dictature portant un masque de démocratie : technique em­ployée à dessein pour discréditer tout gouverne­ment démocratique. La chose est extrêmement simple, et il semble inconcevable que les chefs à qui ont été confiées les destinées des peuples bri­tanniques n'ont pas compris ce qui se passait.

Parlons ici de l'apparition d'une autre menace sur la scène du monde d'avant-guerre : la chose appelée totalitarisme — qui n'est, en réalité, que la dictature ouverte basée sur la force, au lieu de la dictature financière cachée basée sur la déception et improprement appelée démôcratie.

L'avènement des nations totalitaires

Le premier régime totalitaire fut celui des Bol­chévistes de Russie, introduit sous la surveillance directe des puissances d'argent internationales, avec l'aide de l'Allemagne alors impérialiste.

Puis vint la révolution fasciste d'Italie, condui­te par un homme alors rédacteur d'un journal so­cialiste.

Quelque temps plus tard, un ex-caporal de l'armée allemande faisait ses débuts, avec son culte du socialisme-national — nouvelle version du vieux thème de Deutschland Uber Alles. Suivit la révo­lution nazie et le déclanchement de forces qui ont étendu la tyrannie et la désolation de tous côtés.

Le premier point à remarquer, c'est que, dans les conditions où ils évoluaient, ni Lénine et Trotsky, ni Mussolini ou Hitler, ni leurs adeptes respec­tifs, n'auraient jamais pu réussir à s'emparer du pouvoir sans l'appui de puissants intérêts. Au moins dans le cas de Lénine, de Trotsky et de Hi­tler, nous avons des preuves que cette assistance leur fut procurée par les puissances d'argent in­ternationales, soit directement, soit par des canaux qu'elles contrôlaient.

Le second point à remarquer, c'est que ces dic­tatures — bolchévique, fasciste, nazie — ne furent pas lentes à se monter de formidables machines de guerre. Elles ne trouvèrent aucune difficulté à se procurer tous les crédits internationaux nécessaires à cette fin. Elles mirent de côté les obstacles finantiers — opération qui n'aurait pu se faire sans la permission et l'aide active des puissances monétai­res internationales.

Pendant ce temps-là, en Angleterre, en France, aux États-Unis et dans les autres pays démocrati­ques, des parlements complaisants et des gouver­nements harassés ne pouvaient obtenir d'argent pour nourrir et vêtir décemment leurs populations, encore moins financer des mesures de défense na­tionale adéquates pour faire face à la menace des machines de guerre totalitaires.

Cet état de choses ne pouvait être imposé que par le pouvoir occulte et international de l'argent. Cette puissance financière étrangère armait déli­bérément les nations totalitaires et maintenait les démocraties désarmées et incapables, accroupies dans une dépression artificiellement créée.

Ainsi préparait-on la scène pour l'extermination de démocraties discréditées.

L'ennemi de l'arrière

Avec l'ouverture d'hostilités dans lesquelles les nations démocratiques se sont vues forcées, le dos au mur, de combattre pour leur propre existence, une campagne bien organisée a été lancée pour promouvoir un plan qui dépouillerait chaque na­tion de tout pouvoir souverain effectif, en con­centrant le contrôle des finances, les droits de ci­toyenneté et les forces armées entre les mains d'une autorité internationale.

La finance internationale atteindrait ainsi d'un coup son objectif — l'élimination de toute démo­cratie et l'établissement d'une dictature dans la­quelle tout pouvoir effectif, y compris la police et l'armée, serait centralisé sous une autorité inter­nationale dominée par la finance.

Telle est la nature du plan "Union Now", de cette fédération habilement annoncée comme un but de guerre désirable pour l'Angleterre et l'Em­pire britannique soutenus par les États-Unis. De nombreux témoignages indiquent que les forces contrôlées par les puissances d'argent internationa­les sont bien déterminées à façonner le moule du monde d'après-guerre. C'est ce qu'elles appellent leur Ordre Nouveau.

Par une coïncidence étrange, les Allemands ont un plan analogue pour la subjugation de l'Europe à la domination de Berlin. La seule différence, c'est que les propositions de "Union Now", de Clarence Streit, Warburg & Cie, sont basées sur l'étalon-or, tandis que celles des Nazis sont basées sur l'étalon-acier.

Voilà donc, Mesdames et Messieurs, le choix qu'on veut nous offrir — la tyrannie sous une dic­tature financière étrangère ou la soumission à une clique de tyrans militaires.

Par l'action seulement, une action concertée et organisée, pourrons-nous éviter le désastre vers le­quel on nous précipite.

L. D. BYRNE

(Extraits d'un discours prononcé à Winnipeg le 27 octobre 1941. M. Byrne est l'aviseur technique du gouvernement créditiste d'Alberta).

Louis Even

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