La politique – Au berceau d’une loi

Louis Even le dimanche, 15 septembre 1940. Dans La politique

Le bill de conscription vient de devenir loi aux États-Unis.

Que l'on remarque bien, c'est de la loi de conscription des États-Unis, non de celle du Canada, que nous parlons. La nôtre a son origine, sa cause, sa justification si l'on veut, et nous n'entendons nullement la discuter.

Nous n'entendons pas plus discuter la loi de conscription des États-Unis, étant bien mal placé pour le faire ; mais nous voulons simplement noter l'origine, le jour, le lieu et le milieu d'où est parti le mouvement qui, par la sanction du Congrès nanti de l'autorité constitutionnelle, a placé cette nouvelle loi dans les statuts américains.

C'est une leçon de choses qui nous rappelle que tout a un commencement, et qu'il peut être utile de remonter aux origines d'un mouvement pour en connaître les inspirateurs et en juger le désintéressement.

N'est-ce pas Douglas qui nous rappelle que, derrière toute politique il y a un objectif ; derrière tout objectif, une philosophie ; derrière toute philosophie, des hommes ?

C'est le Congressional Record de Washington, du 6 août 1940, qui fournira les intéressants détails résumés ici.

Le Club Harvard, de New York, pourra se vanter d'avoir été l'initiateur du mouvement en faveur de la loi de conscription de 1940 aux États-Unis. Des hommes se réunirent là, à cette fin, le 22 dernier.

Pour une affaire de cette importance, touchant les intérêts de toute une nation et affectant la vie de toutes les familles où jeunesse vit, on pourrait croire à une représentation de toutes les classes de la société : professionnels, marchands, cultivateurs, ouvriers, pères et mères de familles. Détrompez-vous.

Les promoteurs

Présent, l'avocat Grenville Clark, de la firme Root, Clark, Buckner & Ballantine. Et c'est lui qui, selon le sénateur Holt, rédigea le texte original du bill de conscription.

Mais un patriote alors, ce Clark ? Selon une dépêche de la Presse Associée en date du 1er juillet 1937, ce M. Grenville Clark et son épouse, fondateurs de 16 compagnies de fiducie, trouvèrent moyen de soustraire, pendant l'exercice fiscal de 1936, $90,000 de taxes au Trésor Américain. De sorte que, si M. Clark s'est montré tout feu pour la conscription des hommes d'une génération qui n'est pas la sienne, il n'a point l'air empressé pour la conscription de dollars qu'il chérit.

Il y a de ces hommes, selon la remarque du sénateur Holt, qui crient au communisme dès qu'il est question de conscription de dollars, alors qu'ils invoquent la sainte démocratie lorsqu'il s'agit de réclamer la conscription de chair à canon pour protéger leurs dollars.

Présent aussi à cette réunion du 22 mai au Club Harvard, le général John F. O'Ryan. Si le général O'Ryan entretient la même mentalité qu'en 1917 vis-à-vis de la conception du soldat, réjouissons-nous qu'il ne soit pas de l'armée canadienne. Nos généraux ont certainement un sens plus élevé. C'est de lui que sont ces perles :

"La première chose à faire est de détruire toute initiative. À la destruction de l'initiative, ajoutez l'exercice et vous avez le soldat idéal.

"Nous devons dresser nos hommes de telle sorte qu'ils ne soient plus que des machines. "Il faut faire fléchir l'empire de la peur sous un système militaire sans compromission souvent appuyé par un pistolet dans la main de l'officier."

À la réunion était présent aussi M. Henry Stimson, récemment lié à la maison Kuhn, Lœb & Co. Nos lecteurs savent déjà les activités de cette maison financière juive et internationale, la même qui fournit des fonds à la révolution bolchéviste de 1917.

Elihu Root, Jr., membre de la firme Clark, se trouvait là aussi. Et où diable avons-nous vu son nom il y a quelques mois ? Également, M. Robert P. Patterson, aujourd'hui assistant-secrétaire de la guerre. Soignait-il sa destinée ?

Puis Julius Ochs Adler, le gérant-général du grand journal pro-juif, le New York Times. M. Adler est en même temps actionnaire de plusieurs corporations dans les pays actuellement en guerre. Il a des placements à protéger.

Il y avait encore K. P. Budd, directeur d'une compagnie d'assurances qui a bureau-chef à Londres ; J.-B. Taylor Jr., lié à des intérêts monétaires des compagnies d'avionneries et d'aviation ; F. M. Weld, directeur des Baldwin Locomotive Works qui feraient des millions en cas de guerre, ainsi que d'autres intéressés dans des compagnies de placements étrangers, dans des compagnies productrices de caoutchouc, de fer, de fil barbelé, d'huiles, de machines et d'outils.

Des bâtisseurs de la vraie richesse du pays, des éducateurs, des fermiers, des artisans : zéro.

Le lendemain, 23 mai, ces mêmes hommes se réunissaient de nouveau pour passer une résolution pressant le gouvernement américain d'aller jusqu'à l'extrême limite où il ne reste plus qu'un pas à faire pour entrer en guerre.

Le 3 juin, nouvelle réunion. Cette fois, c'est pour lever des fonds de propagande : un quart de million pour lancer une grande campagne en faveur de la conscription.

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Et voilà comment, au pays du dollar, les courtisans du dollar conçoivent une loi "patriotique" pour la défense de la "patrie".

Nous croyons qu'aux États-Unis, comme au Canada, pas un père de famille, pas un jeune homme bien né, ne refusera de voler au secours de son pays s'il vient à être attaqué. Nous voulons croire aussi que, pour pouvoir efficacement défendre son pays contre toute attaque, il faut savoir manier les armes, et c'est dans ce sens, pas pour des expéditions sur des sols étrangers, que les Canadiens-français acceptent la loi de mobilisation. Mais nous aurions honte si, chez nous, des exploiteurs d'hommes venaient, comme au Club Harvard de New York, s'emparer d'un noble idéal pour couvrir la poursuite de leurs vils intérêts.

Louis Even

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