Dans l’article précédent, Louis Even explique les propositions financières du Crédit Social (aussi appelé Démocratie Économique). Geoffrey Dobbs, créditiste britannique disciple de Douglas, rappelle cette vérité de base : aucun système économique ne peut fonctionner sans confiance, et on verra que cela correspond exactement à ce qui se passe actuellement avec la pandémie du coronavirus et le confinement qui a suivi. Dans son pamphlet « Qu’est-ce que le Crédit Social ? », publié en 1981, Geoffrey Dobbs écrit :
« Le terme “crédit social” (sans majuscules) désigne quelque chose qui existe dans toutes les sociétés, mais à laquelle on n’avait jamais donné de nom auparavant, parce qu’on prenait cette chose pour acquise. Nous prenons conscience de l’existence du “crédit social”, du crédit de la société, seulement lorsque nous le perdons.
« Le mot “crédit” est synonyme de foi, ou confiance ; ainsi, nous pouvons dire que le crédit est la foi ou confiance qui lie ensemble les membres d’une société — la confiance ou croyance mutuelle dans chaque autre membre de la société, sans laquelle c’est la peur, et non la confiance, qui cimente cette société... Quoiqu’ aucune société ne puisse exister sans une certaine sorte de crédit social, ce crédit social, ou confiance en la vie en société, atteint son maximum lorsque la religion chrétienne est pratiquée, et atteint son minimum lorsqu’on nie le christianisme ou qu’on s’en moque. »
Avec la pandémie actuelle du coronavirus, où toute activité est pratiquement interdite, les commerces et écoles fermées, et les gens confinés dans leur maison, on peut dire que la confiance mutuelle a atteint son niveau le plus bas : tout est paralysé, les gens vivent dans l’anxiété et ont peur de sortir de chez eux et de rencontrer d’autres personnes, par peur d’attraper le fameux virus... on ne fait plus confiance à personne ! On prenait toutes sortes d’activités pour acquises : la liberté de circuler, participer à la messe dans une église, mais tout ça est disparu du jour au lendemain !
Au paragraphe 32 de son encyclique Caritas in Veritate, le pape Benoît XVI reprend la même notion de confiance expliquée précédemment par Dobbs, mais en utilisant les mots « capital social » au lieu de « crédit social », quand il parle de « l’érosion progressive du “capital social”, c’est-à-dire de cet ensemble de relations de confiance, de fiabilité, de respect des règles, indispensables à toute cœxistence civile. »
M. Dobbs continue : « Le crédit social est donc un résultat, ou une expression en termes concrets, du vrai christianisme dans la société, un de ses fruits les plus reconnaissables ; et c’est le but et la ligne de conduite des créditistes d’augmenter ce crédit social, et de s’efforcer d’empêcher son déclin. Il y a des milliers d’exemples de ce crédit social qu’on tient pour acquis dans la vie de tous les jours. Comment pourrions-nous vivre le moindrement en paix si nous ne pouvons pas faire confiance à nos voisins ? Comment pourrions-nous utiliser les routes si nous n’avions pas confiance que les autres automobilistes observent le Code de la route ? (Et qu’arrive-t-il lorsqu’ils ne le font pas !)
« À quoi servirait-il de cultiver des fruits ou des légumes dans des jardins ou des fermes si d’autres gens venaient les voler ? Comment n’importe quelle activité économique pourrait-elle exister — que ce soit produire, vendre ou acheter — si les gens ne peuvent, en général, compter sur l’honnêteté et des transactions justes ? Et qu’arrive-t-il lorsque le concept de mariage chrétien, de famille chrétienne et d’éducation chrétienne des enfants est abandonné ? Nous réalisons donc que le christianisme est quelque chose de réel avec des conséquences pratiques terriblement vitales, et que d’aucune manière le christianisme ne se limite à un ensemble d’opinions qui peuvent être choisies par ceux qui y sont intéressés. » (...)
« J’en arrive donc enfin à la question de l’argent. Certaines personnes pensent que le Crédit Social se résume à une question d’argent. Ils ont tort ! Le Crédit Social n’est pas avant tout une question d’argent, mais essentiellement une tentative d’appliquer le christianisme dans les questions sociales, dans la vie en société ; et si le système d’argent se trouve être un obstacle à une vie plus chrétienne (et c’est effectivement le cas), alors nous, et tout chrétien, devons nous soucier de ce qu’est la nature de l’argent, et pourquoi l’argent est un obstacle.
« Il existe un urgent besoin que plus de gens examinent de plus près le fonctionnement du système monétaire actuel, quoiqu’il ne soit pas demandé à tout le monde d’être des experts sur ce sujet. Mais lorsque les conséquences du système monétaire actuel sont si abominables, tout le monde doit au moins saisir les grandes lignes de ce qui ne fonctionne pas et doit être corrigé, afin de leur permettre d’agir en conséquence... »