En lisant les journaux - No. 9

le mercredi, 01 mai 1940. Dans En lisant les journaux

Tout, excepté...

Il y a quelques semaines, M. Esdras Minville, directeur de l'École des Hautes-Études commerciales, parlant à un groupe d'hommes d'affaires, au Cercle Universitaire, traçait un portrait fidèle de notre situation économique actuelle. Sa conférence, selon le rapport de La Presse, pouvait se résumer ainsi  :

En dépit de la guerre, aucun de nos problèmes actuels ne sera résolu.

Cependant, le conférencier offrait des solutions  :

Il faudrait réadapter notre économie politique  ; renouveler notre politique de colonisation  ; celle de nos exploitations forestières  ; réadapter aussi notre enseignement à tous les niveaux  ; créer un centre d'études et de recherches économiques  ; continuer l'inventaire de nos ressources naturelles.

De l'argent nécessaire pour faire tout cela, et de réforme monétaire, pas question. Il n'y a pas de problème d'argent, du moins pas pour les salariées des Hautes-Études de Montréal. Rappelons, en passant, que Beaudry Leman est membre du conseil de direction de cette institution que vous et moi soutenons en partie de nos deniers pour former notre élite diplômée.

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Auréolé par la guerre

De L'Évènement, reproduit par La Tribune  :

Le blé autant que la mitraille gagnera la guerre... Le Canada est excellemment armé sous ce rapport  ; nous connaissons les chiffres de sa dernière récolte, près de 480 millions de boisseaux, quantité suffisante de froment pour nourrir les armées alliées et les populations civiles pendant des mois... Les emblavures de l'Ouest donnent un des meilleurs blés au monde dont le contenu en protéine s'élève de 12 à 15 pour cent. Le producteur accomplit donc une œuvre aussi essentielle que le canonnier derrière son canon.

Et quand les armées alliées seront licenciées  ? Et quand les civils seront redevenus disponibles pour leur propre production de denrées alimentaires  ? Quelle œuvre essentielle accomplira alors le producteur de blé de l'Ouest  ? Le jeune professeur Angers, des Hautes-Études, aime à écrire et à dire que c'est la grosse production de blé de l'Ouest qui est la cause de la crise au Canada  ! Ça lui a même valu des compliments publics de Beaudry Leman.

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Trop pauvres pour payer

D'un récent numéro du Federated Railwayman :

L'Association des Banquiers du Nebraska (E.-U.) tînt récemment son assemblée annuelle à Omaha et adopta un programme qui, entre autre chose, demande l'exemption, de la Loi des Heures et Salaires. En d'autres termes, les banquiers s'objectent à payer à leurs employés un minimum de $12.50 par semaine.

Le journal ajoute :

Est-il surprenant qu'un employé de banque, manipulant de grosses sommes d'argent, cède parfois à la tentation ? Un juge refusait dernièrement de condamner un caissier pris en défaut, parce que, dit le juge, le salaire de cet homme n'était pas suffisant pour lui procurer un niveau de vie décent.

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Les victuailles sous clé

D'après une dépêche de la Presse Associée, de Cambridge, Mass. :

Le docteur Thomas Parran, chirurgien en chef du service fédéral de la santé publique, déclare que plus de 40 pour cent de la population des États-Unis ne suivent pas une diète nécessaire au maintien de la santé. Cet état de chose, ajoute-t-il, devrait être reconnu comme un problème national. Cette nouvelle sorte d'inanition peut encore être plus néfaste dans ses ultimes conséquences sociales que les anciennes famines qui ont causé périodiquement la mort de nombre de personnes. Les victuailles dont les États- Unis ont un surplus apparent sont précisément celles dont la diététique nationale manque : le lait et les produits du lait, les fruits, les légumes verts et les viandes.

Pourquoi ? Le problème est-il de changer le cœur de l'homme ou de lui mettre un peu plus d'argent dans la poche ?

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En effet

Du Monde Ouvrier, de Montréal : ·

Il faut supprimer les taudis comme il faut supprimer l'ignorance. Comme l'a dit le poète, "l'ignorance est brutale, elle imprime au visage une marque fatale." Il en est de même du milieu ambiant des taudis où la misère et la saleté montrent leur hideux visage et perpétuent parmi nous une race de misérables et de parias dont les descendants pourraient bien, un de ces quatre matins, protester contre un pareil état de chose, lequel n'a pas sa raison d'être.

Pas sa raison d'être, non. La rareté de l'argent, qui en est la cause, n'a pas non plus sa raison d'être. Donnez les dividendes du crédit social, et vous ne parlerez plus de taudis.

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Pour l'élite embourgeoisée

Extrait d'une causerie du R. P. Louis Lachance, dominicain, au poste CHLT, Sherbrooke :

Ne conviendrait-il pas que nos élites professionnelles, industrielles et commerciales assument leurs responsabilités à l'égard des classes inférieures ? Étant donné qu'elles ont plus reçu en richesses spirituelles et matérielles, de la société, n'est-il pas logique qu'elles encourent envers elle des devoirs plus grands et plus pressants ? Gardons-nous, messieurs, de tomber dans l'erreur puérile de croire que nous nous sommes faits nous-mêmes, que nous sommes les fils de nos œuvres. Ce n'est pas vous, messieurs qui avez fondé le collège et l'université où vous avez reçu votre éducation ; ce n'est pas vous qui avez formé les professeurs et écrit les livres qui vous ont transmis votre savoir ; ce n'est pas vous qui fabriquez les instruments si compliqués et si précis qui sont quotidiennement mis à votre usage. La société vous a favorisés et même choyés et vous lui êtes pour autant redevables. Par suite du poids singulier de votre influence, si vous mettiez à nous unir autant d'ardeur que vous en déployez à nous diviser politiquement, la condition de notre peuple s'en trouverait rapidement améliorée et notre pays tout entier ne s'en porterait que mieux".

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L'obstacle ?

Du Devoir, du 19 avril, dans l'article de M. Louis Dupire, commentant, après la Gazette, une étude du Dr. Grant Fleming, professeur d'hygiène au McGill :

"Nos enfants sont notre dernière ligne de défense. Ce serait négligence criminelle que de laisser quoi que ce soit intervenir dans leur santé ou leur développement."... Il ne suffit pas, cépendant, d'amener les enfants à savoir ce qu'ils doivent manger pour acquérir et préserver leur santé ; il faut qu'ils puissent se procurer ces aliments. "Il ne sert de rien d'enseigner aux gens à donner à leurs enfants une chopine à une chopine et demie de lait par jour, un œuf par jour, quelque viande, deux légumes en plus des pommes de terre, quelque fruit avec de l'huile de foie de morue en hiver, à moins que le prix de ces aliments ne soit à la portée de leur pouvoir d'achat."

Abaisser les prix ? Trouve-t-on que les cultivateurs demandent trop cher pour leur lait, leurs œufs, leurs animaux, leurs légumes, leurs fruits ? Pourquoi ne pas demander plutôt d'augmenter le pouvoir d'achat au niveau des prix ? Un dividende, pris à personne, en crédit national tout neuf, sans endettement, distribué à tout le monde : à qui cela ferait-il du mal ? Ça règlerait bien d'autres problèmes, mais ça constiperait le banquier, et il paraît que ce n'est pas négligence criminelle de laisser les décrets de cet auguste personnage-là intervenir dans la santé et le développement de nos enfants !

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