Un créditiste - Un homme

Gilberte Côté-Mercier le mercredi, 01 octobre 1941. Dans Crédit Social

On remarque partout que le mouvement du Crédit Social dans la province de Québec est une école pour former des hommes véritables. Les adversaires l'expriment par leur dépit et leur singerie (ce n'est pas de l'imitation honorable, parce qu'ils manquent de sincérité). Les amis nous en disent leur joie. Et les hommes eux-mêmes qui sont les sujets de cette éducation en éprouvent un grand bonheur, et voient s'élargir de plus en plus leurs aspirations vers la perfection.

Le mouvement créditiste autour de VERS DEMAIN, une école d'hommes. Pourquoi ?

Parce que la philosophie créditiste est une philosophie d'ordre, et parce que l'action du mouvement créditiste est une action vigoureuse en vue d'atteindre des résultats.

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La philosophie créditiste est une philosophie d'ordre.

Pour le créditiste, ce qui compte, c'est la fin. Un homme, une chose doivent remplir la fonction pour laquelle ils sont faits. L'argent est fait pour acheter ; il faut qu'il achète ce qui est à vendre. La politique est faite pour servir le peuple ; il faut qu'elle cesse de l'exploiter ! La raison a été donnée à l'homme pour qu'il se conduise lui-même ; que les dictateurs finissent d'imposer leurs idées et leur discipline. Les hommes s'associent pour réaliser un bien commun ; il faut que disparaissent les divisions de partis politiques et les corruptions d'égoïsmes privés.

Voilà comment pense le créditiste. Il a pris l'habitude d'analyser, de toujours se demander pourquoi, et de ne pas perdre de vue ce pourquoi dans la suite de ses raisonnements.

Le créditiste a le sens des fins, des objectifs. C'est un philosophe, l'homme de bon sens pur et simple. C'est un homme véritable, quoi !

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Non, pas encore. Le créditiste qui se contenterait de savoir et ne ferait pas d'apostolat ne serait pas un homme véritable, ni même un créditiste véritable. Et l'école créditiste n'a pas encore atteint sa fin en lui, elle ne l'a pas encore formé.

C'est une erreur assez répandue de croire qu'un homme intelligent, par le seul fait qu'il est intelligent, rend service à la société et que par conséquent il accomplit sa mission d'homme. Parce que l'on croit généralement cela, on recherche souvent les grands hommes chez les intellectuels. Le raisonnement et l'expérience nous amènent pourtant à d'autres conclusions.

Satan est l'un des êtres de la création qui fut créé avec l'une des plus belles intelligences, sinon la plus belle. Il connaît parfaitement la vérité. Et pourtant c'est lui qui fait le plus de mal dans le monde. Il ne bâtit rien. Il démolit continuellement.

Il en est de même de certaines grandes intelligences d'hommes qui passent leur vie à ne rien faire ou à nuire à ceux qui travaillent.

De même, le créditiste qui se contente de voir la lumière et qui ne la porte pas aux autres.

Tel n'est pas le cas des membres de l'Institut d'Action politique, des entraîneurs et des voltigeurs.

Eux, ils voient par leur intelligence. Et tout de suite leur volonté suit leur intelligence. Le bien qu'ils voient, ils le désirent, ils le veulent d'une volonté efficace. Ils bougent pour l'avoir.

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Les créditistes dignes de leur nom sont rentrés dans l'action, dans l'action en vue de résultats.

Le membre de l'Institut d'Action politique recrute des abonnements au journal VERS DEMAIN, sans espoir de récompense immédiaite en argent, puisqu'il ne recevra aucune commission ; sans espoir de positions honorifiques ou lucratives, puisque ni les unes ni les autres ne lui seront données.

Pour recruter des abonnements, le membre est obligé de se former lui-même, de s'étudier, de faire des examens de conscience pour savoir pourquoi dans tel cas il n'a pas réussi, et comment il devra s'y prendre une autre fois. C'est de la discipline intérieure, celle que l'esprit donne au corps dans l'homme.

Et ce n'est pas tout. Le membre de l'I.A.P. renonce aux consolations humaines, puisqu'il s'expose à recevoir des reproches, à se faire traiter de communiste ou de révolutionnaire, d'exalté ou de paresseux. Notre apôtre passe par là-dessus, en considérant son objectif. Il s'oublie pour son œuvre. Sans parler des risques qu'il prend parfois de perdre les revenus financiers d'un emploi ou d'une clientèle. Cela complète la formation intérieure qu'il se donne. Cela le fait un homme chez qui la raison domine les passions.

L'organisation elle-même de l'Institut d'Action politique ne trouve pas toujours le moyen de rendre justice à ses travailleurs en reconnaissant leurs services, parce que ce n'est pas un Institut de reconnaissance, mais un Institut pour donner le Crédit Social :

Voilà déjà l'homme qui se montre dans le membre de l'Institut.

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Ce n'est pas tout. Il y a dans l'Institut plus que le membre. Il y a l'entraîneur, celui qui dirige d'autres membres dans l'action. L'entraîneur est un meneur d'hommes, un formateur d'autres hommes. Cette nouvelle fonction lui demande encore plus de renoncement que la précédente. Les hommes qu'il conduit sont des hommes qui travaillent par dévouement, qui se dépensent librement. Il faut plus d'application et d'esprit de sacrifice pour réussir dans cette besogne de chef, qu'il ne faut de brutalité au tyran qui fait marcher les autres en leur montrant leur salaire, le picotin d'avoine de la bête attelée. C'est pour cela que les entraîneurs de l'I.A.P. sortent de la médiocrité et avancent plus que les autres dans leur formation.

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Puis, c'est le conférencier, le voltigeur, celui-là qui sort tous les dimanches pour prêcher le Crédit Social.

Ses sacrifices à lui ne se comptent plus.

Il a une seule journée de congé par semaine. Ce jour-là, il le donne tout entier au Crédit Social.

Il se lève de bonne heure le matin. Premier sacrifice.

Il quitte sa maison, sa femme et ses enfants. Deuxième sacrifice.

Puis, il part pour sa mission. En s'en allant, il songe à sa conférence, à la manière dont il s'y prendra pour rassembler le monde et les intéresser, et les abonner, et former l'Institut. Voilà beaucoup de soucis pour un seul homme. La vision de l'objectif ne lui laisse pas le loisir de songer à lui-même. Il se met au second plan pour ne penser qu'à son ouvrage, l'œuvre qu'il accomplit.

Comme on le voit, le créditiste devient de plus en plus homme, parce que de plus en plus c'est l'esprit qui mène chez lui. Il est libre, de la liberté véritable, puisqu'il se tient en mains. Et un homme est un homme dans la mesure où il est libre.

Et ce voltigeur deviendra bientôt un chef. Il en possède toutes les aptitudes. L'Institut lui fournit l'occasion. Chef d'équipe, chef d'un groupe de voltigeurs, il en prendra toute la responsabilité. Il a en mains des hommes, un programme, un secteur à couvrir, des rapports à faire, des résultats à présenter.

C'est un échelon de plus dans l'Institut d'Action politique. C'est un échelon de plus dans la formation de l'homme.

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Voilà le secret du succès des créditistes. Ils sont des hommes. Voilà le secret de l'Institut d'Action politique. Il est une école d'hommes.

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Conclusion à tirer pour les créditistes : devenir plus hommes pour être plus créditistes.

Conclusion à tirer pour les hommes : devenir créditistes pour compléter leur formation.

Conclusion à tirer pour les adversaires : devenir créditistes s'ils veulent enfin être des hommes.

Gilberte Côté-Mercier

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