Organisme de propagande, d’organisation, de réalisation

Gilberte Côté-Mercier le lundi, 01 septembre 1941. Dans La vie créditiste

L'I. A. P. — Hier et demain

L'Institution d'Action Politique compte à peine quinze mois d'existence. Fraternité politique ? destinée à remplacer les organismes de division, de cabale et de trahisons que sont les partis politiques, l'Institut se développe vigoureusement, nous dirions même rapidement, bien qu'il doive lui-même tracer sa voie. L'Institut introduit une nouvelle manière dans la politique. Rien de tel n'existait au Canada, ni, que nous sachions, en aucun autre pays. Mais l'innovation s'imposait.

"Il semble normal et inévitable, qu'à des conceptions sociales et politiques nouvelles correspondent des organes d'action appropriés...... Ces nouvelles formations politiques, il convient, à notre avis, de les concevoir comme des fraternités politiques d'un type entièrement inédit...... ressemblant à des ordres religieux, mais ordres purement profanes." (Jacques Maritain.)

Les créditistes n'ont pas peur du neuf pour faire du neuf. C'est bien à eux que devait revenir l'honneur d'être les premiers à tenter la fondation d'une telle fraternité politique "d'un type entièrement inédit".

Les superficiels ne virent tout d'abord, dans l'I.A.P., qu'un subterfuge pour faire travailler des "abonneux" sans salaire. Ils prirent les directeurs de l'Institut pour des exploiteurs de naïfs, et les membres pour des naïfs exploités.

On se rend compte aujourd'hui que c'est une tout autre affaire, et que l'Institut d'Action Politique, par des cadres nouveaux et par des méthodes nouvelles, est bel et bien en train de former "des hommes qui comprennent le bien commun et soient capables demain de prendre la responsabilité de l'établir" dans la province de Québec. Les véritables exploiteurs de la politique, ceux qui ne songent qu'à saisir ou garder les rênes du pouvoir afin d'en profiter, commencent à être pris de jaunisse.

L'Institut ouvre des cadres nouveaux à mesure que c'est nécessaire pour répondre à son développement. Il sait aussi s'adapter aux lieux, aux temps et aux circonstances pour marcher vers sa fin.

Dès que les premiers I.A.P. eurent atteint leur objectif immédiat, par l'enrôlement à l'étude de 24 familles, la direction établit les "entraîneurs". Un entraîneur est un homme d'action qui a fait ses preuves et travaille maintenant à former d'autres hommes d'action — au moins trois autres — en leur communiquant son zèle, et les fruits de son expérience.

L'Institut peut aussi se glorifier d'avoir produit en 1941 quelque chose sans précédent dans l'histoire d'aucun mouvement politique en notre, pays. Nous voulons parler des équipes de conférenciers, actuellement au nombre de 112, qui vont chaque dimanche, dans autant de paroisses différentes, rencontrer le public au sortir de la grand'messe.

C'est de l'instruction disséminée partout, et cela ne pouvait se voir dans la politique de partis qui ne prospèrent bien que grâce à l'ignorance du peuple. Cela pouvait difficilement se trouver aussi dans certains mouvements de réforme qui s'en tenaient à la méthode du parti et plaçaient leur objectif dans la prise du pouvoir.

Fondations

Nous considérons les conférenciers 1941, non seulement comme des propagandistes efficaces, mais comme de véritables fondateurs. Propagandistes, parce qu'ils prêchent la doctrine dans des places nouvelles. Fondateurs, parce qu'ils laissent ordinairement dans chaque paroisse visitée des abonnés qui continuent de s'instruire et des I.A.P. qui continuent d'organiser.

En dehors de ses grandes villes, la province de Québec compte 1,220 paroisses. Les créditistes ont placé ces 1,220 paroisses dans leur programme. Ils veulent d'abord une fondation dans chacune d'elles. Une fondation, c'est un noyau d'abonnés, quatre, cinq ou davantage ; c'est aussi un noyau d'organisation, un deux, trois membres de l'Institut.

Les conférenciers en ont fait, de ces fondations, depuis le début de la saison 1941, depuis les derniers jours d'avril. Ils n'ont pas fini, ils vont continuer.

Développements

Entre la fondation et l'objectif, entre une demi-douzaine et le cinquième des familles sur la liste des abonnés à VERS DEMAIN, il reste une marge. Il faut que cette marge soit franchie.

Dans certaines paroisses, une fois la fondation faite, le développement marche automatiquement. Mais pas partout. Cela dépend surtout du degré de dynamisme des premiers membres enrôlés dans l'Institut.

Ainsi, le 20 juillet dernier, M. Germain Bégin, de Magog, parlait après la grand'messe à St-Alexandre d'Iberville. St-Alexandre est une paroisse de 172 familles. Environ 100 personnes écoutèrent le conférencier ; 45 achetèrent de la littérature, mais un seul abonnement répondit à l'appel. L'abonné, M. Albert Raymond, s'inscrivit comme membre de l'Institut.

Bien petite fondation ; échec apparent. Mais, le 14 août, le bureau de VERS DEMAIN recevait de St-Alexandre onze abonnements pris par M. Albert Raymond, ainsi qu'une importante commande de littérature créditiste. C'est dire que le très petit noyau du début se développe rapidement.

Par contre, nous pourrions nommer des places où l'état de l'abonnement n'a pas bougé depuis l'automne 1940.

La seconde étape de l'organisation va consister à accélérer ce qui marche trop lentement, à "décoller" ce qui ne marche pas du tout.

C'est à quoi nous allons nous appliquer plus particulièrement cette année, confiant ce travail à nos "voltigeurs".

Les Voltigeurs

C'est la première fois que le journal mentionne les "Voltigeurs" de l'Institut d'Action Politique, Depuis plusieurs semaines déjà, l'Institut force ce nouveau cadre : on voulait le lancer avant de le proclamer.

Et qu'est-ce qu'un Voltigeur dans l'Institut d'Action Politique ? C'est un membre déjà aguerri, comprenant bien l'objectif, sachant se dévouer pour un idéal, et décidé à faire tout ce que l'Institut lui demandera dans les bornes de son temps et de ses capacités.

Le Voltigeur est une sorte de "profès" dans l'Institut d'Action Politique. Il a complété son entraînement, son noviciat, et consacre maintenant toutes ses énergies disponibles au service de la grande cause.

Conférenciers, Voltigeurs

Dans la phase actuelle du développement, nous allons demander au Voltigeur, pour commencer, de choisir deux paroisses rurales, stationnaires ou non encore touchées au point de vue Crédit Social, et de les conduire à leur objectif. Par objectif, nous entendons : a) au moins le cinquième des familles abonnées à VERS DEMAIN ; b) de bons I.A.P. qui se meuvent ; c) toute la paroisse systématiquement organisée, avec un bon conducteur résident.

Ainsi, M. Arthur Ducharme, voltigeur de Sherbrooke, a pris sous sa tutelle Windsor-Mills (comté de Richmond) et Durham-Sud (comté de Drummond). Windsor-Mills, place de 700 familles, sera rendue à point lorsqu'on y comptera au moins 140 abonnés et six membres de l'Institut bien actifs. L'abonnement n'y est actuellement qu'à 25. Durham-Sud, avec 150 familles, compte 12 abonnements, bon commencement pour le chiffre de la population ; mais l'Institut a besoin d'y être mis en train.

M. Ducharme va voir à ces deux paroisses ; les visiter quand il pourra, en suivre les développements ; écrire aux I.A.P. enregistrés, en choisir d'autres au besoin ; prendre tous les moyens qu'il connaît et ceux qui lui seront inspirés, pour aboutir au résultat. Il ne lâchera pas ses deux filleules d'ici là. Chaque semaine, il fera rapport à la direction de l'Institut de ses activités et des progrès réalisés.

Ainsi pour la vingtaine d'autres Voltigeurs de Sherbrooke qui ont choisi chacun deux places "à pousser". Ainsi pour tous les autres Voltigeurs de la province qui vont participer à cette campagne nouvelle.

Conférenciers, compagnons de conférenciers, et d'autres aussi, pourvu qu'ils aient la volonté et sachent y mettre leurs loisirs, peuvent entrer dans les rangs. Mais pas de place pour les tièdes, ni pour ceux qui font passer leurs intérêts personnels avant ceux de la société. Les Voltigeurs sont nos "troupes de choc", comme on s'exprimerait en Allemagne ; non "phalangistes", dirait-on en Espagne. L'histoire du Canada nous fourni l'appellation "Voltigeurs", qui suggère d'ailleurs assez bien le genre de travail qu'on attend de ces créditistes ardents. Avec ces termes militaires, nos armes restent celles des créditistes, celles qui ont si bien réussi jusqu'ici.

Une armée de 600 Voltigeurs permettrait de s'attaquer immédiatement aux 1,200 paroisses rurales de la province. Il y a aussi de l'ouvrage à faire dans les villes ; on le répartira selon une division appropriée.

Certains Voltigeurs iront plus vite que d'autres ; soit parce qu'ils possèdent plus de ressources, plus de compétence ; soit simplement parce que les places élues par eux répondront avec plus d'empressement. On étendra le programme de ceux-là. Ce n'est pas une question d'égalité, mais d'ordre.

À celui qui a reçu plus de talents, il sera demandé davantage. D'ailleurs, rendu au degré de Voltigeur, un créditiste plane au-dessus des petits calculs ; il voit grand, beau, droit, et se dépense sans compter pour son idéal.

Au Congrès du 31 août, à Sherbrooke, nous exposons en détail le nouveau cadre de l'Institut, le cadre des Voltigeurs. Puis nous commençons sur place, à la séance de l'après-midi, le recrutement de Voltigeurs, les invitant à désigner le plus tôt possible, immédiatement s'ils ont fait leur choix, quelles paroisses ils vont entreprendre les premières et conduire à leur objectif.

L'année 1941 reste l'année des conférenciers ; 1942 sera l'année des Voltigeurs. Nous attendons beaucoup de cette forme d'activités, parce que les Voltigeurs constituent une élite. Ils n'en sont plus à leurs premiers pas. Ils ont développé et leur personnalité et leur esprit d'initiative. Par eux, toute la province peut être rendue créditiste d'ici douze mois.

Louis Even


"Les apôtres du Crédit Social se forment eux-mêmes à devenir des hommes qui comprennent le bien commun et soient capables de prendre la responsabilité de l'établir.

"Puis, ces apôtres forment d'autres créateurs qui, avec eux, bâtiront notre province économique et politique.

"Notre école créditiste est une université, et une université qui ne s'isole pas sur une colline inaccessible, mais une université qui va au peuple puisque le peuple est trop pauvre pour aller à l'université."

Gilberte CÔTÉ

Gilberte Côté-Mercier

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