Des chiffres pour acheter

Louis Even le samedi, 15 novembre 1941. Dans Le Crédit Social enseigné par Louis Even

Dans les échanges entre les hommes, l'argent commence là où cesse le troc. Le troc, l'échange direct d'une marchandise contre une autre de valeur égale, est démodé. Peu souple et de moins en moins pratique, à mesure que la production se spécialise.

Et l'argent n'est autre chose qu'un chiffre. Un chiffre qui donne droit à des produits, n'importe où et n'importe quand dans le pays, jusqu'au montant exprimé par le chiffre.

Un chiffre gravé sur un disque de métal. Un chiffre imprimé sur un rectangle de papier. Un chiffre écrit dans un livre de banque.

Aussi bon dans un cas que dans l'autre.

S'il y a une différence entre les divers genres de chiffres, elle est dans la commodité. Le plus commode et le plus parfait des trois, est bien le chiffre dans le compte de banque. Il est à l'abri des pertes et des voleurs. Il ne s'use pas par l'usage. Au moyen d'un chèque tiré sur un compte de banque, on paie les montants les plus complexes à compter. Payez $798.97, ou payez $100.00, cela ne vous prend pas plus de temps. S'il fallait compter en billets de banque et sous, vous compteriez au moins deux fois et vous risqueriez encore de vous y tromper. Avec le chèque, un nombre, une signature : le banquier fera les additions et les soustractions pour vous.

Un débit dans un compte, un crédit dans un autre, et la marchandise bouge aussi bien, aussi vite, que si le débit était fait dans une poche et le crédit dans une autre.

Tout le monde sait comment le chiffre passe d'une poche à une autre, ou d'un compte à un autre. Mais combien se sont demandé où le chiffre commence ?

Puisque ces chiffres, qui servent à acheter, sont en réalité des permissions de vivre dans le monde moderne, n'est-il pas intéressant de savoir où naissent les permissions, qui en règle le nombre et l'étendue ?

Les créditistes ont depuis longtemps appris que le chiffre commence dans le livre du banquier. Les autres, les chiffres sur du métal ou sur des billets, ne viennent en circulation que pour remplacer ceux qui naissent d'abord dans le livre du banquier. Vous encaissez un chèque : débit dans un compte, crédit dans votre poche. C'est le métal ou le billet sortant de la banque pour prendre la place d'un chiffre précédemment né quelque part dans la banque.

Le chiffre, pour naître, exige la volonté de quelqu'un. Quel est le moteur de cette volonté ? Quel est le mobile qui préside à la naissance des chiffres pour acheter, à la naissance des permissions de vivre ? Qui leur met des conditions ? Qui limite ces permissions, au lieu de les livrer en rapport avec les moyens de vivre que peut fournir le pays ?

Questions intéressantes qu'a élucidées le Crédit Social. Et le Crédit Social offre une technique pour rendre l'octroi des permissions de vivre plus social et plus scientifique. Plus social, en faisant le chiffre naître au crédit de tous les membres de la société. Plus scientifique, en faisant le chiffre naître au rythme de la production potentielle du pays.

Louis Even

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