Chapitre VIII

H. M. Murray le dimanche, 01 janvier 1933. Dans Principes de Crédit Social

Deuxième réforme : Le Dividende social national

En résumé :

  1. La première cause des troubles économiques du monde réside dans le fait indéniable que l'agrégat des prix est toujours plus élevé que l'agrégat des revenus ;

  2. La cause de cette différence réside dans la manière dont le crédit est émis et annulé, ce qui a proprement pour effet une hausse des prix s'ils ne sont pas scientifiquement contrôlés ;

  3. L'effet ultime de cette différence est la guerre ou la famine, qui l'une ou l'autre, ou les deux à la fois, détruiront la civilisation présente, si le système financier actuel n'est pas radicalement réformé ;

  4. La réforme implique l'émission de crédit aux consommateurs indépendamment des frais, ainsi que la réglementation des prix et la vente au-dessous du prix de revient.

Le remède aurait immédiatement plusieurs effets capitaux :

  1. Les prix faits aux consommateurs tomberaient immédiatement à une fraction de leur niveau actuel, et continueraient de tomber ; tandis que les revenus, au lieu de tomber, augmenteraient progressivement avec toute nouvelle avance de nos connaissances appliquées ;

  2. La communauté serait en mesure de payer tout ce qu'elle produirait. Conséquemment, tant que les besoins économiques ne seraient pas satisfaits, l'industrie et le commerce pourraient travailler à plein rendement. Les cycles de dépression et de prospérité disparaîtraient, car les besoins humains, eux, ne croissent ni ne décroissent jamais comme font ces cycles anormaux ;

  3. La pauvreté serait abolie ; toute l'énergie humaine, inutilisée, mal dirigée en raison de cette pauvreté, trouverait des débouchés naturels, au plus grand profit de la santé nationale ;

  4. Le commerce extérieur perdrait son caractère de concurrence impitoyable et agressive, et ainsi la principale cause des guerres cesserait d'exister. Il n'y aurait aucune nécessité absolue de rechercher des marchés étrangers, en ce sens que nous ne serions pas contraints de faire la chasse aux acheteurs étrangers pour maintenir nos industries en activité, étant donné que nous aurions chez nous, tous les acheteurs voulus. Mais, comme nous avons acquis un goût spécial pour les « commodités » étrangères, il n'y a pas de raison pour que nous nous en privions ; et, bien entendu, nos exportations de marchandises en échange paieraient pour nos importations de marchandises étrangères. L'objet réel du commerce extérieur ou d'exportation est de DIVERSIFIER la consommation.
  5. Tout capital nouveau provenant en fait de la communauté, via les banques, et le contrôle des prix étant une fonction commune, le pouvoir du soi-disant capitaliste d'exploiter ses employés et les consommateurs, et même toute tentation de le faire, serait anéantis. Les grèves et lock-outs deviendraient de mauvais souvenirs du passé ; et bientôt les distinctions irritantes entre Capital et Travail, capitalistes et ouvriers, n'auraient plus aucune signification et seraient oubliées ;

  6. La race humaine s'élèverait à un niveau plus élevé, et commencerait à goûter la vraie liberté et la vraie paix pour la première fois dans l'Histoire.

Une partie indispensable de la réforme proposée est que de l'ARGENT, égal en quantité à la valeur de tout nouveau capital (capital immobilisé) ou toutes valeurs de capital créés, DEVRAIT ÊTRE DISTRIBUÉ GRATUITEMENT ET ÉGALEMENT, sous la forme d'un DIVIDENDE SOCIAL, à CHAQUE citoyen, comme un DROIT, et indépendamment de ce qu'il peut gagner par son travail.

Le DROIT de chaque membre de la communauté à ce revenu gratuit ne saurait en aucune manière être mis en doute. La Machine productive est une création COMMUNE, et les connaissances accumulées des siècles passés ont toutes contribué à cette création. Ce n'est PAS la création des hommes qui la dirigent aujourd'hui. Leur contribution, isolée de tout ce qu'ils ont hérité du passé, n'a pas plus de valeur intrinsèque que celle de l'Homme des cavernes. Et la puissance de production de cette Machine est si considérable, si elle est bien utilisée, que ce serait pure folie que de ne pas baser une politique sociale sur ces deux faits absolument incontestables.

Nous devons évidemment payer ceux qui font marcher la Machine, et les bien payer. Mais le surplus qu'ils produisent en plus de leurs salaires ou revenus, bénéfices ou dividendes, est un excédent auquel ils n'ont personnellement AUCUN DROIT et qui proprement appartient à la communauté. Ce surplus devrait être distribué également entre TOUS les citoyens, sans condition ni stipulation d'aucune sorte.

Si nous avons un préjugé quelconque contre ce revenu gratuit, il faudra nous en débarrasser. Car la vérité toute nue est que la main-d’œuvre humaine devient de moins en moins importante chaque jour comme facteur de production. Et si les êtres humains ne sont pas pourvus d'un revenu gratuit, la plus grosse partie des habitants du monde n'aura bientôt plus aucun droit à l'existence.

La possession d'une revenu personnel gratuit rendrait chacun, homme, femme, enfant, indépendant, et les mettrait en mesure d'envisager l'avenir avec confiance et égalité d'âme. Cela les mettrait aussi à même de résister à toutes sortes de tyrannies. Combien de choses honteuses sont faites aujourd'hui par des gens qui, pourtant, détestent les faire, simplement parce qu'ils n'ont pas de moyens indépendants d'existence qui leur permettent de ne pas les faire ?

 

H. M. Murray

Poster un commentaire

Vous êtes indentifier en tant qu'invité.