Le 11 décembre dernier, pendant les débats de l'Assemblée nationale, au Parlement de Québec, Mme Nicole Loiselle, députée libérale de Saint-Henri-Sainte-Anne, blâmait la ministre péquiste Louise Harel, responsable de la réforme de l'aide sociale, de réduire les prestations d'aide sociale pour les mères seules, et qu'elles ne pourront plus élever leurs enfants à plein temps. (Auparavant, une prestataire de l'aide sociale recevait une allocation supplémentaire pour la garde d'un enfant de six ans ou moins, mais la ministre Harel veut réduire cet âge à deux ans, et « donner un coup de pouce » aux mères monoparentales, en les forçant à se trouver un emploi, plutôt que de rester sur l'aide sociale.)
La ministre Harel a répondu à Mme Loiselle : « Je l'invite à faire attention, à ne pas tomber dans les propositions des Bérets Blancs de Mme Gilberte Côté-Mercier... » (On sait que Vers Demain propose, entre autres, une allocation de 12 000 $ par année pour la mère au foyer, qui ne serait pas prise dans les taxes, mais financée par de l'argent nouveau, créé par la Banque du Canada.) À ces mots du ministre, Mme Loiselle a répliqué : « Je préfère porter un béret blanc plutôt que d'être la marionnette du président du Conseil du Trésor et du ministre des Finances. » Félicitations, Mme Loiselle, voilà qui est bien répondu !
Plutôt que de suivre les « propositions des Bérets Blancs de Mme Gilberte Côté-Mercier » (le Crédit Social), et de réclamer que le gouvernement fédéral reprenne son droit de créer l'argent, sans dette, et de mettre au pas la Banque du Canada, le gouvernement péquiste de Lucien Bouchard préfère suivre les propositions des financiers, et aller de l'avant avec ses nombreuses coupures. En agissant ainsi, il se fait réellement « la marionnette des financiers ».
La ministre Harel dit que « la véritable indépendance économique, c'est d'avoir un emploi. Mais ces emplois, où sont-ils ? La vérité, c'est qu'il y aura de moins en moins d'emplois disponibles, à cause du progrès. Pierre Foglia, journaliste au journal La Presse de Montréal, s'en est rendu compte, et l'a expliqué, dans le style qui lui est propre, dans sa chronique du samedi 14 décembre 1996 ;
« Ils ont encore dit qu'ils allaient créer des emplois. Mme Harel, que j'aime bien pourtant. M. Bouchard. Même les syndicats s'y mettent. Et l'opposition. Tous. Cette semaine, comme la semaine d'avant, comme le mois dernier, comme tous les jours depuis au moins dix ans, ils ont encore répété que leur priorité c'était l'emploi ; qu'ils allaient sauver des emplois ; qu'ils allaient créer des emplois.
« Ce qui m'étonne, c'est que personne ne s'étonne... Il n'est pas inutile de rappeler, en ces temps où on est en train de mythifier l'emploi, qu'un emploi est créé par le besoin de faire faire quelque chose par quelqu'un. Les mots-clé là-dedans, c'est "besoin de quelqu'un". Il y a de moins en moins d'emplois parce que l'industrie a de moins en moins besoin d'ouvriers et de cadres pour produire les biens que nous consommons. Et ce n'est pas parce que ça va mal. C'est parce que cela va bien au contraire. C'est parce que la technologie fait en sorte que l'industrie a moins besoin de bras. C'est ça le progrès. C'est, en tout cas, une des définitions les plus communes, les plus admises du progrès : libérer l'homme de la servitude du travail.
«...ll va y avoir de moins en moins de jobs. Parce que le progrès a de moins en moins besoin de bras, c'est dans sa nature même. Il a seulement besoin de consommateurs. Et là on arrive aux vraies questions.
Comment faire consommer des gens qui ne travaillent pas ?... Est-ce que la consommation de biens culturels (et donc leur production) ne pourrait pas nous occuper aussi pleinement que la production de toasters (grille-pain) ? Sans que la production de ces toasters n'en soit, par ailleurs, nullement affectée. Des machines quelque part vont continuer de fabriquer 12 000 toasters à l'heure, d'autres machines vont les emballer et un ordinateur va les vendre, sans qu'une armada de syndiqués s'emmerdent 35 heures par semaine à les usiner et à les assembler.
Je ne voudrais pas vous donner l'impression d'avoir des réponses aux graves questions que pose la fin de l'emploi... J'attends seulement qu'on en discute. C'est le défi des temps présents... Au lieu d'essayer de répondre à cela, les gouvernements sont encore à dire qu'ils vont créer des emplois. Ou ils sont menteurs, ou ils sont un peu cons.... Dites-le donc une fois pour toutes qu'elle (la job) ne viendra pas. »
Bravo, M. Foglia, pour avoir vu le progrès, et pour dire en vos mots ce que les créditistes de Vers Demain répètent depuis des années.. Par contre, si vous prétendez ne pas avoir la réponse à ce problème de « la fin de l'emploi », les créditistes, eux, l'ont : c'est le dividende mensuel à tous, ce qui réaliserait vraiment « l'indépendance économique » pour chaque individu.
En février 1996, les différentes églises chrétiennes du Canada (la Conférence des évêques catholiques du Canada, ainsi que les Églises anglicane, Unie, presbytérienne et luthérienne) émettaient conjointement un message intitulé « Qu'est-ce que le Seigneur exige de nous aujourd'hui ? » qui, tout en dénonçant les coupures et injustices sociales actuelles au pays, proposait des « routes d'espoir » : « Les dépenses sociales sont loin d'être la principale cause de la dette ou du déficit national. Ainsi, avant de fixer nos choix, examinons sérieusement les divers moyens à prendre : réduire les taux d'intérêt, faire financer la dette nationale par la Banque du Canada...
« Selon l'antique croyance des Hébreux, Dieu invitait à une année de jubilé, à tous les cinquante ans. Quand arrivait l'année du jubilé, les terres étaient rendues, les dettes oubliées, les champs laissés en jachère, afin que l'égalité sociale soit rétablie et que l'on reconnaisse que Dieu était ultimement le seul pourvoyeur, le seul à posséder toute chose. L'esprit du jubilé ne serait-il pas ce que le Seigneur exige de nous en ce moment ? »
Les six plus grandes banques à charte canadiennes ont encore une fois déclaré des profits records pour l'année 1996 : 6,3 milliards $, soit une hausse de 22% comparativement à 1995 (qui avait aussi été une année record). Curieusement, 1996 a aussi été une année record pour le nombre de faillites au pays (78 206 faillites pour les dix premiers mois de 1996, soit une hausse de 21% comparativement à l'année précédente). Y aurait-il un lien entre les deux, de cause à effet ? (Le malheur des uns fait la prospérité des autres...)
Certains diront que comme toute entreprise privée, il est normal que les banques fassent des profits raisonnables. Mais attention, ces chiffres ne dévoilent pas tout. En effet, la plupart des économistes s'accordent à dire que c'est au moins trois quarts des profits des banques qui ne sont pas dévoilés publiquement, au moyen de jeux de comptabilité. Par exemple, lorsqu'une banque veut acheter ou construire un nouvel édifice, elle ne fait que déposer son chèque dans une autre banque, qui fait elle aussi la même chose, et la banque se retrouve avec un nouvel édifice de, disons, 300 millions de dollars, sans avoir dépensé un seul sou, et cette « dépense » de 300 millions $ n'apparaît même pas dans son bilan à la fin de l'année ! Qui dit mieux ?
On sait que les banques poussent de plus en plus pour l'avènement de « l'argent électronique » et de la « société sans argent » (pour que l'argent de papier soit éliminé et remplacé par les cartes à puce). Tandis qu'au Canada certaines banques offrent des rabais pour ceux qui paient avec leur carte de débit au lieu de l'argent liquide, la méthode est différente en Suède : ceux qui paient avec leur carte paient le prix normal, mais ceux qui paient avec du papier-monnaie doivent payer une amende en plus !
En décembre dernier, Pierre F. Coté, Directeur Général des Élections du Québec, se déclarait en faveur d'une carte d'électeur, ou carte d'identité universelle. Le ministre péquiste Pierre Bélanger, responsable de la réforme électorale, dit que le cabinet se penche sur l'émission d'une carte de citoyen qui aurait des effets de carte « multiservices ». Des audiences publiques sont d'ailleurs prévues en janvier 1997 au Québec sur ce sujet.
Dans l'édition du 15 décembre 1995 du magazine québécois L'Actualité, un article de Michel Venne rapporte les craintes de Maître Daniel Jacoby, Protecteur du Citoyen du Québec, à ce sujet, disant qu'on pourrait même en arriver à un État policier, qui saurait tout sur la vie privée de ses citoyens.
Le même article rapporte que BIT Integration Technology, une firme de Markham, en Ontario, « multiplie les démarches auprès des gouvernements provinciaux pour leur vendre sa nouvelle "carte intelligente", pudiquement appelée carte "multi-services" par ceux qui y voient un formidable outil de gestion, mais que l'on pourrait aussi appeler la "carte mouchard", si l'on songe que cette carte jumellerait automatiquement tous les fichiers concernant un individu : identité, citoyenneté, dossier médical, permis de conduire, revenus, impôts, passeport, voyages, etc. ! »
Quiconque ayant accès à cette carte pourrait lire toutes les informations vous concernant. L'article de L'Actualité se termine ainsi : « Pour l'instant, BIT Integration Technology n'a vendu sa carte mouchard qu'à un seul gouvernement, celui de la Chine ! » En effet, une telle carte convient très bien à un gouvernement qui veut contrôler le plus possible la vie de tous ses citoyens...
Tous les Canadiens savent que le Premier Ministre Jean Chrétien avait promis d'éliminer la TPS (Taxe sur les Produits et Services). Tous... sauf Jean Chrétien lui-même ! Le 10 décembre 1996, au cours d'une émission avec le public sur les ondes du réseau anglais de Radio-Canada, à une dame qui lui reprochait d'avoir trahi sa promesse de « scrapper » (éliminer, tuer) la TPS, Chrétien répliqua qu'il n'avait jamais rien promis de tel, et que tout ce que le programme du Parti Libéral promettait à ce sujet, c'était de remplacer la TPS par une autre taxe. Bien entendu, le lendemain, tous les médias d'information se firent un plaisir de ressortir toutes les déclarations du Premier Ministre, dûment enregistrées sur cassettes, où il disait clairement qu'il allait « abolir, scrapper, éliminer, tuer la TPS » (et la TPS fut justement une des principales raisons de la défaite des Conservateurs aux élections).
Devant le tollé général de la population de tout le pays (les journaux The Globe and Mail et The Star, de Toronto, allant même jusqu'à le traiter de menteur), Chrétien fut obligé quelques jours plus tard de s'excuser à contre-cœur : « Beaucoup de gens ont cru que la TPS allait disparaître et être remplacée par rien. Nous aurions dû nous expliquer plus clairement... Je m'excuse si des gens ont cru qu'on allait abolir la taxe. »
Si des gens ont cru cela, M. Chrétien, c'est parce que c'est exactement ce que vous aviez dit. Peut-être dans votre esprit que ce n'était qu'un immense mensonge pour gagner les élections. La TPS n'est ni éliminée, ni remplacée. Le seul moyen pour vous de tenir votre promesse et de ne pas subir le même sort que les Conservateurs de Mulroney aux prochaines élections, c'est de mettre la Banque du Canada au pas, et de créer sans dette l'argent pour le pays ; en d'autres mots, d'appliquer le Crédit Social. M. Chrétien, cessez d'être la marionnette des financiers, et devenez le serviteur du peuple !