La vie créditiste - VIII

le vendredi, 01 novembre 1940. Dans La vie créditiste

Le journal et l'institut créditistes

Le journal

Depuis une année, le progrès de la doctrine créditiste dans le Canada français pivote autour du journal Vers Demain.

La déclaration de guerre, le désarroi dans les esprits, les professions de foi conscriptionnistes de MM. Herridge et Blackmore, avaient dressé des obstacles nouveaux devant lesquels nombre de propagandistes jugeaient tout effort voué à l'échec.

La plupart des comités de la Ligue du Crédit Social, hâtivement formés et insuffisamment alimentés de littérature, existaient bien plus sur le papier que dans l'action réelle.

C'est dans ces circonstances critiques que des animateurs irréductibles et audacieux eurent l'inspiration et le courage de lancer un organe nouveau, le semi-mensuel Vers Demain.

Dès le premier numéro, nous saluâmes dans ce nouveau venu un journal d'idées qui méritait de vivre. Sa tenue, belle de sobriété ; la crânerie de ses articles ; la vigueur d'un patriotisme bien canadien-français ; le caractère social de sa philosophie ; la limpidité de ses exposés économiques ; un équilibre sain, qui se garde à la fois du matérialisme avilissant et des lâches évasions vers un pharisaïsme orgueilleux et stérile — tout contribuait à ménager à Vers Demain un accueil chaleureux chez quiconque n'a pas encore rendu ses armes à l'ennemi.

Les créditistes ne sauraient être trop reconnaissants à M. Louis Even et à Mademoiselle Gilberte Côté de cette initiative surgie dans une heure aussi sombre.

Notre expérience personnelle nous a trop mis au courant de l'influence néfaste et débilitante de la presse goujate ou sans nerfs, pour que nous ne nous réjouissions pas de l'avènement d'un périodique libre et agressif.

Aussi, lorsque, en novembre 1939, le directeur de Vers Demain vînt solliciter notre collaboration pour l'introduction de son journal dans les milieux québécois, nous prîmes cette tâche à cœur et nous n'avons depuis manqué aucune occasion de recommander Vers Demain tant aux intellectuels qu'aux simples ouvriers.

Nous apprenons avec joie que Vers Demain entre aujourd'hui dans plus de six mille foyers, dont bientôt mille dans notre vieille capitale. Nous allons doubler, sinon tripler ce résultat pendant la seconde année de vie du journal.

Chaque lecteur devient un convaincu capable de convaincre les autres. Ainsi se formera, dans toutes les classes de la société, l'élite nouvelle, au sens social, qui permettra des réalisations depuis longtemps prêchées mais toujours remises.

L'Institut

L'autre initiative, greffée sur Vers Demain et dont Vers Demain tire maintenant sa puissance d'expansion, c'est l'Institut d'Action Politique, dont M. Even nous annonçait la fondation en reprenant ses activités après un accident qui l'avait confiné à la chambre et à la méditation pendant une couple de mois.

L'Institut d'Action Politique est quelque chose de nouveau dans son genre, pour promouvoir une politique nouvelle par des méthodes nouvelles. Dès que nous avons compris le sens de l'Institut, nous en avons saisi tout de suite les immenses possibilités.

Chaque membre de l'Institut qui atteint son objectif devient le fondateur d'un noyau de vingt-quatre lecteurs réguliers du journal. Par le membre de l'Institut, le journal peut donc compter sur vingt-quatre nouveaux abonnés, que le membre continuera de réabonner d'année en année.

Avec le développement de l'Institut, avec son introduction dans les diverses paroisses de la province de Québec, on peut envisager un effectif de quelque trois mille membres, groupant autour d'eux plus de 60,000 lecteurs assidus de Vers Demain. Pas en un an, pas en deux ans, sans doute. Mais que ne peut-on attendre de la persévérance tenace dont ont fait preuve ceux qui dirigent Vers Demain ? Immense armée, bien munie, bien organisée, qui serait prête pour toutes les campagnes et renverserait tous les obstacles.

Des amis de la cause nous ont demandé s'il était à propos de rétablir les cadres de la Ligue du Crédit Social, apparemment sans tête et démobilisée depuis plus d'un an. Chacun peut avoir et faire valoir ses propres idées ; mais selon nous, pourquoi une autre organisation lorsque l'Institut peut accomplir exactement ce qu'accomplirait la Ligue la mieux conçue ? Pourquoi se dépenser en efforts pour solliciter des contributions toujours difficiles à maintenir, lorsqu'on a une organisation de travailleurs s'inspirant des méthodes en usage dans l'Église, établie sur un plan d'apostolat, pour poursuivre une œuvre de rénovation sans argent ?

Il est vrai que pour certaines activités collectives locales, assemblées et autres, il faut rencontrer les frais. Mais les membres de l'Institut, ayant acquis l'entraînement pour l'approche et l'argumentation, savent, au besoin, se faire les solliciteurs attitrés pour des dépenses occasionnelles. Chaque membre de l'Institut, étant en rapport avec vingt-quatre familles, peut rapidement mettre en branle au moins les énergies de ces vingt-quatre familles. Multipliez par le nombre de membres !

À ceux qui ont de l'argent à placer pour l'avancement du Crédit Social nous n'hésitons pas une minute à dire qu'ils ne peuvent mieux l'employer qu'à propager et cultiver les convictions par l'abonnement à Vers Demain.

À ceux qui ont du dévouement personnel à utiliser au service de leur cause, nous recommandons fortement l'enrôlement dans l'Institut d'Action Politique. Moins de clinquant peut-être que dans une Ligue avec officiers, sous-officiers et queue. Moins de séances délibératives, moins de discussions sportives. Mais du vrai travail, du travail personnel à plein, avec un objectif pur et désintéressé, sous une direction qui n'a encore jamais déçu.

Ajoutons que le petit journal Vers Demain, par les horizons qu'il ouvre et éclaire dans le politique, l'économique et le social, nous apparaît de plus en plus comme l'organe de liaison, capable de faire la collaboration, sans noyer les identités, entre les différents groupes de travailleurs sociaux, qui, sous des bannières spécialisées, poursuivent un objectif commun. Raison de plus pour le recommander et appuyer l'Institut qui le propage.

J.-E. GRÉGOIRE, avocat, Québec

Poster un commentaire

Vous êtes indentifier en tant qu'invité.