La lettre suivante, du directeur de l'I. A. P., est à l'adresse de chaque membre de l'Institut, pris individuellement, parce que le directeur consi- dère chaque membre comme assumant personnellement le travail d'éducation auquel il s'est nommément engagé.
Cher Collaborateur,
Le mouvement créditiste est bien lancé dans la province de Québec. Mais il ne progresse pas et ne progressera pas tout seul. Plus il rencontre de résistance, plus il sera immobilisé s'il n'y a pas constamment des forces à l'œuvre pour entretenir et accélérer la marche en avant.
Or les forces adverses sont très puissantes, et il ne faut rien moins que toute votre énergie personnelle, comme celle de ceux qui se sont engagés comme vous dans ce travail de libération, pour en venir à bout.
C'est ce que vous avez compris lorsque vous avez donné votre nom au recruteur, à la suite probablement d'une assemblée où le Crédit Social vous est apparu dans toute son ampleur.
Votre travail est bien déterminé. Votre objectif : gagner vingt-quatre familles à l'étude assidue de la chose publique.
Comme dans toute entreprise, c'est la fondation qui présente le plus de difficultés. Une fois votre liste complétée, vous trouverez relativement aisé de l'entretenir. Le goût de la lecture aura été formé, le journal lui-même fera le travail.
Je vous suggérerais de commencer par vos amis, vos parents, par ceux que vous pouvez le plus facilement influencer. À mesure que le grou- pe d'abonnés grossira dans votre paroisse, l'idée créditiste s'affirmera, et il sera plus facile d'enrôler d'autres étudiants.
Servez-vous de votre liste pour aborder un nouveau "prospect". Vous hâtez sa détermination en lui montrant combien de ses concitoyens, de ses amis veulent sortir de l'ignorance générale qui nous a fait tant de mal.
Profitez de toutes les occasions. À la campagne, c'est surtout le dimanche, après la messe, ou sur semaine à la beurrerie, à la fromagerie, au magasin, que vous avez l'occasion de causer. Ne perdez pas de vue que vous êtes un apôtre du Crédit Social.
Et soyez fier de votre Institut. Un institut, pas un parti. C'est, je crois, la première expérience de la sorte au monde dans le domaine politique. Comprenez le mot "politique" dans son sens élevé. La politique a exploité une masse tenue dans l'ignorance dans le passé. Désormais, c'est la multitude instruite qui va surveiller et orienter la chose publique.
Vous garderez précieusement dans vos dossiers de famille ces feuilles de l'Institut où vous inscrivez vos conquêtes. Plus tard, vos enfants se- ront fiers de les posséder comme témoignages de la part personnelle que vous aurez prise dans la libération du monde aujourd'hui esclave des puissances d'argent.
Il faut bâtir ces mois-ci un Institut fort et actif. Tout dépend de chacun de ses membres. Pour qu'il y ait multiplication des efforts individuels, il faut d'abord qu'il y ait l'effort individuel. C'est à vous-même à le fournir. D'autres font leur part, faites la vôtre avec joie et fierté. C'est ingrat, direz-vous peut-être. Les gens n'ont pas d'argent, et un dollar est dur à obtenir. Je le sais. Mais je sais aussi que le gouvernement qui prélève des piastres pour son maître le banquier ne demande pas au contribuable si l'argent est rare ou abondant. Tous trouvent les taxes trop fortes et l'argent trop rare pour les payer. On veut changer ça. La piastre du citoyen pour s'instruire est le meilleur moyen d'y arriver. Voilà un argument à faire valoir.
Le but que nous poursuivons vaut tous les efforts, toutes les audaces. Lorsque l'Institut d'Action Politique sera bien établi dans 500 paroisses ou davantage, nous disposerons d'une force immense pour l'action comme pour la revendication de droits lésés. Force d'autant plus effi- cace que chaque membre de l'Institut sera un travailleur personnel, en contact immédiat avec vingt-quatre familles étudiant et poursuivant le même idéal.
Redoublez donc d'énergie, cher collaborateur, et ne laissez passer aucune quinzaine, aucune édition de votre cher journal, sans gagner au moins un nouveau lecteur. Si le travail ressemble exclusivement à du défrichement à la main cette année, dès l'an prochain il prendra au moins dans votre région, l'aspect d'une avance mécanisée irrésistible. Que cette pensée vous soutienne un peu dans vos efforts quotidiens.
Ensemble pour un meilleur Canada,
Louis EVEN.
C'est du nord de la province qu'il s'agit. Le dernier numéro de Vers Demain signalait la tournée de notre directeur en Abitibi. Elle s'est parachevée d'une manière splendide.
Après l'apothéose de La Sarre, où, malgré la pluie continuelle, se groupaient près de deux mille personnes ; après une autre semaine, accordée surtout à des paroisses de colonisation, M. Even parlait dans un centre important de l'Abitibi minier, à Val d'Or, le soir du dimanche 15 septembre.
Val d'Or avait déjà son cercle d'étude du Crédit Social. Avec l'aide de ce groupe de jeunes et la collaboration du Dr Desrosiers, M. Trottier monta une soirée remarquable. Le grill du Val d'Or était plein à capacité. Toute la causerie de M. Even, qui dura près de deux heures, fut irradiée par le poste CKVD. L'enthousiasme de l'audience se soutint jusqu'au bout ; le journal gagna de nombreux abonnés nouveaux et l'Institut compte maintenant une bonne représentation à Val d'Or.
Le lendemain soir, sortant de l'Abitibi, notre directeur rencontrait la population de Rouyn, en Témiscamingue. Les organisateurs avaient loué la plus grande salle de la ville, la salle de Saint-Michel-Archange. Ils n'eurent pas à le regretter, toute autre eût été trop petite. L'assemblée de Rouyn fut le digne couronnement de cette randonnée créditiste de deux semaines dans le nord de la province. Nous ne briserons pas l'anonymat qui nous fut imposé par le groupe organisateur de Rouyn ; mais nous tenons à manifester notre reconnaissance à M. et Mme Adrien Crevier pour leur hospitalité envers le conférencier, ainsi que notre appréciation de l'accueil encourageant trouvé près de l'élite dirigeante de Rouyn. Le Dr Rioux, le Dr Samson, le Dr Roy, MM. Caouette et Bertrand ne nous en voudront pas de men- tionner leurs noms.
Ajoutons que La Voix Populaire de Val d'Or et La Frontière de Rouyn ont accordé une très large place dans leurs colonnes aux rapports res- pectifs de l'une et l'autre assemblées.
Notre directeur est revenu extrêmement satisfait et des plus encouragé. Il part maintenant pour une tournée plutôt brève dans Richmond-Wolfe et dans Mégantic ; elle sera suivie d'une campagne plus détaillée dans le comté de Rimouski.
La Direction de Vers Demain remercie M. A. Jarry de la photographie documentaire qu'il a eu la bonne idée de fournir et que nous reprodui- sons en première page du présent numéro. Ceux de nos lecteurs qui auraient des services analogues à rendre à leur journal seront bienvenus.