D’un banquier converti

le dimanche, 15 juin 1941. Dans Citations, Histoire bancaire

Vincent Cartwright Vickers, né en 1879 et décédé en 1939, fut 22 ans directeur de la firme Vickers Limited, et pendant neuf ans, de 1910 à 1919, siégea parmi les gouverneurs de la Banque d'Angleterre. Il résigna ce dernier poste en 1919, conscient du vice de notre système monétaire et déterminé à mettre au service de l'humanité l'information acquise dans le sanctuaire même de la Haute Finance.

Sa fille, Lady Cawdor, vient de publier une partie de ses écrits, compilés en volume sous le titre "Economic Tribulation. »

Le livre explique comment « les grandes affaires, les banques, l'agriculture et autres formes d'activités humaines sont impliquées dans les maux économiques qui sont la principale cause de guerre et ont fait de la chrétienté une tragi-comédie."

Voici la préface du livre, telle qu'écrite par M. Vickers lui-même en octobre 1939 :

"Celui qui écrit ces lignes n'a nullement besoin de preuves de l'importance du système monétaire sur les vies humaines, ni même sur la future existence de la race anglaise, tant que ce système tiendra la position qu'il occupe maintenant dans notre économie nationale.

"Des milliers d'hommes et de femmes d'éducation endossent complètement mes vues, je crois. Mais lorsque les plus zélés réformateurs de l'argent essaient de traiter un sujet aussi vaste et aussi important que le système monétaire et la conduite de nos finances nationales, leurs efforts semblent voués à l'échec tant qu'ils ne seront pas soutenus par de grands experts financiers dont les noms font autorité dans le pays. À défaut de cet appui, la meilleure alternative, c'est que l'auteur soit lui-même qualifié par son expérience passée pour exprimer une opinion méritant lecture.

"C'est pourquoi j'ai décidé de donner à mes lecteurs mes propres qualifications pour placer devant le peuple britannique les conditions précaires de notre système monétaire, tel qu'il existe en ce pays aujourd'hui ; pour leur démontrer que notre système d'argent forme la partie la plus importante du système économique, et que le système économique de la nation fait partie de notre système social.

"Je suis resté ardent partisan de la réforme monétaire depuis ce jour de 1926 ou, non par arrogance mais en toute humilité, je jugeai mon devoir d'expliquer au gouverneur de la Banque d'Angleterre, M. Montagu Norman, qu'à l'avenir, je le combattrais, lui, l'étalon-or et la politique de la Banque d'Angleterre, jusqu'au dernier jour de ma vie (et je me rappelle encore les termes de sa réponse !)

"Quelques années plus tard, je résignai mon long directorat à Vickers Limited. Depuis lors, j'ai consacré beaucoup de temps et d'argent à proclamer la nécessité d'une réforme du système monétaire.

"Ceci m'a naturellement amené en rapport avec la plupart des groupes de la collectivité ; avec des Communistes et ceux qui ont des intérêts égoïstes à pousser, avec des mécontents et des débiteurs, mais aussi avec des patriotes honnêtes et désintéressés.

" Je n'ai pas gagné plus du dixième de mon revenu. Le reste provient de placements dans les banques, dans le capital de la Banque d'Angleterre, dans des titres américains et canadiens, etc., je suis donc un "capitaliste", au sens propre du terme, quelqu'un qui a connu de meilleurs jours ; satisfait de ma situation financière présente, mais bien opposé à voir réduire davantage mon niveau de vie actuel.

"Je n'ai aucun sentiment de malice contre ceux de ma classe ou de toute autre classe. Je ne cherche ni la notoriété ni la faveur. Si quelqu'un peut me prouver le non-fondé de mes convictions, je serai heureux de les changer. Mais depuis quinze ans, absolument rien n'est venu altérer mes vues. Je crois encore que le système existant est activement nuisible à l'État, qu'il engendre la pauvreté et le chômage, et qu'il est la cause fondamentale de la guerre.

"Cette confession personnelle a simplement pour but de démontrer que je connais les deux côtés de la médaille. Mes opinions sont basées sur mes connaissances et ma propre expérience. J'ai l'avantage d'être dans une position entièrement désintéressée et sans animosité envers personne. Je ne me juge plus sous aucune restriction, sauf celle d'éviter ce qui pourrait nuire à mon pays ou causer préjudice à qui que ce soit".

V. C. VICKERS, octobre 1939

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