Une lettre de chômeur

le mercredi, 15 janvier 1941. Dans Autres, Témoignages

La lettre suivante pourra servir de sujet de méditation à ceux qui, avec trois bons repas par jour et une maison confortable, aiment à répéter que les chômeurs sont des paresseux, des gens qui ne veulent pas travailler et placent leur idéal à vivre aux dépens des autres.

La lettre est adressée à un Monsieur N..., pour demander de l'emploi sur les chantiers de construction d'un grand établissement. Ces travaux emploient environ cent personnes, et Monsieur N... nous dit qu'il a reçu, sans les solliciter, de trois à quatre cents demandes analogues à celle que nous reproduisons textuellement (corrigeant seulement l'orthographe). Nous y avons en vain cherché l'ombre d'un sentiment de paresse ou de jalousie des plus fortunés.

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Sherbrooke, 9 décembre 1940.

Bien cher Monsieur N...,

Je vous écris quelques lignes pour vous demander si vous m'avez oublié. Vous m'aviez dit, la dernière fois que j'ai été à votre bureau, que vous étiez pour me téléphoner.

Je vous demande avec fidélité et sincérité, et vous supplie en me jetant à vos genoux, de ne pas m'abandonner, s'il vous plaît ; pour l'amour du bon Dieu, faites-moi entrer à..., pour que je puisse travailler. Je connais la grandeur de votre cœur, Monsieur N... Je le sens du plus profond de mon cœur que vous ne m'oublierez pas. Si je vous ai fait de la peine dans le passé, Monsieur N..., je vous demande de me le pardonner.

Et, en terminant, je vous souhaite un joyeux Noël et une heureuse année à tous, et du bonheur et de la prospérité. Je vous les souhaite du plus profond de mon cœur. Au revoir, Monsieur N..., et voici de nouveau le numéro du téléphone où vous pouvez m'appeler.

A. R.

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